Les éléments de problématique sur la ville inclusive à partir d’un état des lieux de la dialectique entre inclusion et exclusion
2010
Le quatrième Forum International sur la Pauvreté Urbaine (FIPU) s’est déroulé à Marakkech en Octobre 2001 sur le thème « Villes productives et villes inclusives, vers des villes pour tous ». Des membres de l’association internationale de techniciens, experts et chercheurs (AITEC) ont préparé, animé et produit le rapport consacré à la Ville inclusive. L’orientation du FIPU s’inscrit dans la continuité de la déclaration finale de la conférence internationale sur la pauvreté urbaine de Recife organisée en 1996 dans le cadre de la préparation de la conférence d’Istanbul. L’objectif du Forum de Marrakech était de faire progresser la connaissance et la conscience des mécanismes d’exclusion, de promouvoir des politiques intégrées de réduction et de suppression de la pauvreté dans les villes, et de développer des compétences nécessaires à la mise en œuvre de telles politiques. Nous présentons dans cette fiche les éléments de problématique sur la ville inclusive à partir d’un état des lieux de la dialectique entre inclusion et exclusion, puis nous présentons les orientations proposées par l’AITEC.
« La lutte contre la pauvreté urbaine, enjeu majeur de notre siècle, a pour théâtre les villes du monde. C’est là que se joue la dialectique de l’exclusion et de l’inclusion. » C’est en ces termes qu’est introduite la note de cadrage rédigée par des membres de l’AITEC et accompagnée d’une courte définition de l’exclusion et la pauvreté : « en principe, pauvreté se réfère à la privation de biens, aux besoins élémentaires, et l’exclusion à un processus sociétal qui englobe tous les aspects de la situation d’un individu ou d’un groupe par rapport au système social dans lequel il se trouve. » Cette définition est complétée par les apports de la déclaration de Récife qui porte une critique aux réponses institutionnelles qui se focalisent sur la création de revenu sans prendre en considération les facteurs sociaux, politiques et psychologiques qui constituent le caractère indivisible de la pauvreté.
Le rapport développe une vision Lefebvrienne de la ville comme projection au sol des rapports sociaux, où se développe une double domination, dans la société dans laquelle ils s’exercent d’une part, et à l’échelle des rapports de force mondiaux, d’autre part. Les auteurs observent que la ville est avant tout exclusive : « la ville s’est construite sur la division – division verticale ou horizontale, selon les lieux et les époques, de l’habitat des différentes catégories socioprofessionnelles et/ou ethniques, division du travail, affectation distincte des lieux de consommation marchande, culturelle, de sport et de loisirs». Par ailleurs, les auteurs sollicitent les travaux d’Alain Tourraine sur la transformation d’une société pyramidale à une société réticulaire où l’on est inclu (in) ou exclu (out).
La question de la ville inclusive est introduite à partir de l’idée de la citoyenneté : « historiquement la ville est le lieu de la rencontre de l’autre, de l’échange, de l’affranchissement des féodalités». Les auteurs montrent qu’il existe des contres-tendances à l’exclusion avec le développement d’initiatives et de solidarités, comme la création de réseaux inter-communautaires et internationaux, des initiatives de renouvellement urbain populaire portées par des ASI et ONG, ou encore l’action des municipalités dans le sens de la régularisation foncière, du développement des services urbains et « d’une gestion urbaine adaptée à l’intégration des exclus ». Les auteurs s’appuient sur les expériences issues de la base de donnée « des villes inclusives sur les villes et les pratiques » et les recherches sur l’approche de la pauvreté et son éradication de l’unité de planification du développement de l’Université de Londres. Finalement, les auteurs proposent « un projet politique de la ville inclusive qui remet en cause les privilèges de ceux qui en jouissent aux dépens des exclus. C’est en ce sens qu’il est porteur d’un changement social à négocier entre toutes les parties prenantes ».
Considérant la dialectique de l’exclusion et de l’inclusion comme centrale pour lutter contre la pauvreté urbaine, et l’exclusion comme l’élément dominant, les auteurs proposent d’identifier les marges de manœuvre et d’inverser le sens de la contradiction afin que l’élément dominant devienne l’inclusion. Trois orientations ont été mises en débat lors du Forum International sur la Pauvreté Urbaine : combattre les mécanismes d’exclusions par le développement d’une ville productive, le renforcement des mécanismes inclusifs comme les projets participatifs, les formes de gestion urbaine renouvelée et les stratégies sur la reconnaissance et la défense des droits.
Pour approfondir :
AITEC, Forum International sur la Pauvreté Urbaine (FIPU), 4ème conférence internationale, Villes productives et villes inclusives, 2001, Sonia Fayman (dir)
TOURAINE A. : Face à l’exclusion, in Citoyenneté et Urbanité, Esprit 1991