La majorité des personnes touchées par la faim et la sous-alimentation – environ 80% – vit dans des régions rurales. La plupart d’entre elles travaille dans de petites exploitations agricoles. Ces populations vivent en majorité dans les pays du Sud, en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Selon les études actuelles, c’est dans ces mêmes régions que l’on remarque déjà d’importantes conséquences du changement climatique, des conséquences qui vont s’aggraver dans le futur.
Le Sud victime des excès du Nord
Ce n’est pas dans les pays du Sud, mais dans les pays industrialisés qu’est produite la plus grande quantité des émissions de CO2 responsables du changement climatique. La majeure partie des gaz à effet de serre provient de la combustion d’énergies fossiles. Néanmoins, l’agriculture et les changements dans l’utilisation du sol, comme par exemple la déforestation, contribuent également au réchauffement climatique.
La désertification, l’augmentation du nombre d’inondations et de tempêtes ainsi que des variations accrues de température sont des phénomènes qui rendent difficiles ou empêchent la production agricole et la pêche traditionnelle. Parallèlement, l’exploitation croissante de grandes surfaces agricoles par de grandes entreprises détruit les moyens de subsistance de nombreuses familles paysannes, alors que celles-ci pourraient protéger l’environnement grâce à l’agriculture biologique. Les nomades sont quant à eux de plus en plus déplacés de leurs terres traditionnelles.
Le réchauffement de la planète : faits et chiffres
Le réchauffement climatique est un phénomène bien réel qui s’accroît à une vitesse vertigineuse. Il s’agit d’un problème qui va encore s’aggraver. Tel est le constat de milliers de scientifiques qui ont collaboré aux travaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Leurs rapports ne laissent plus aucun doute :
Le climat mondial se réchauffe. Les températures globales vont continuer à augmenter.
Le lien entre le réchauffement climatique et la concentration de CO2 et d’autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère existe et a pu être démontré scientifiquement.
La haute teneur en CO2 actuelle est le résultat des activités humaines, c’est-à-dire de la combustion de carburants fossiles (pétrole, gaz naturel, charbon). Cette concentration dépasse aujourd’hui largement les variations naturelles mesurées ces 650’000 dernières années.
Un miroir des inégalités globales
La consommation d’énergie et, par conséquent, les émissions de CO2 sont le reflet des inégalités globales entre les riches et les pauvres. Elles révèlent le gaspillage sans scrupule des ressources et le mode de vie non durable des pays du Nord. Un habitant d’Amérique du Nord émet en moyenne vingt fois plus de CO2 par an qu’un être humain en Afrique. Près de 70% de toutes les émissions de CO2 depuis 1850 proviennent de l’Amérique du Nord et de l’Europe. La part des pays en développement est inférieure à 25%. L’impact des différents gaz à effet de serre, tel que le méthane, peut être calculés une fois convertis en équivalents CO2 (CO2-eq). Dans la mesure où le méthane nuit vingt fois plus au climat que le CO2, même de faibles quantités de ce gaz ont leur importance.
Le climat mondial s’est déjà réchauffé de plus de 0,5°C au XXe siècle en raison de la teneur accrue en CO2. Entre 2000 et 2030, le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) prévoit un accroissement de 25 à 90% – selon les modèles – de la concentration de CO2 dans l’atmosphère. Les émissions de gaz à effet de serre, si elles continuent à ce rythme ou augmentent, conduiront au XXIe siècle à un réchauffement mondial qui dépassera de loin celui du XXe siècle. Actuellement, la température s’accroît de 0,2°C tous les dix ans. Elle continuerait à augmenter même si la teneur en CO2 se stabilisait au niveau de l’an 2000. Ce qui se passera après 2030 dépendra des mesures de politique énergétique et climatique qui sont prises aujourd’hui. Un point crucial est, par exemple, de savoir si les combustibles fossiles joueront encore un rôle dominant dans l’éventail des énergies consommées.
Vers 1850, la teneur en CO2 dans l’atmosphère se situait à 280 ppm (parts per million) d’équivalents CO2. Elle est actuellement de 380 ppm et devrait atteindre 550 ppm en 2035. Avec une telle concentration, la température globale sera au minimum de 2°C plus élevée qu’en 1990 – cela avec une probabilité de 77 à 99%. Cette augmentation de 2°C de la température est vue comme un seuil critique. Au-delà de ce seuil, les modifications du climat mondial sont potentiellement irréversibles.
Voici quelques exemples de la longue liste des conséquences probables :
Des courants marins comme le Gulf Stream pourraient se modifier ou même s’immobiliser.
Les climats régionaux spécifiques, comme les moussons en Asie du Sud, pourraient brusquement changer, les forêts tropicales se dessécher et certains écosystèmes être perturbés.
Les glaces du Groenland pourraient fondre de plus en plus vite. Leur fonte intégrale ferait augmenter de 6 mètres le niveau des mers.
Le permafrost de la toundra pourrait également fondre en libérant les énormes quantités de CO2 qu’il a absorbé.
Afin d’éviter ce tournant irréversible, une stabilisation rapide de la concentration de gaz à effet de serre à 400 ou 450 ppm d’équivalents CO2 est nécessaire. Cela ne sera possible que si l’on atteint le point culminant des émissions mondiales de CO2 vers 2015 et que ces dernières diminuent ensuite de 50 à 85% d’ici 2050. Une baisse de 30% des émissions de CO2 doit donc déjà avoir lieu d’ici 2020. Cela implique, concrètement, une réduction de 2.5 à 3% des émissions de CO2 par an.
Si, en revanche, le point culminant n’est atteint qu’en 2025 – soit 10 ans plus tard –, le taux de réduction devra être deux fois plus élevé, ce qui occasionnera des coûts bien plus importants.
Conséquences pour l’alimentation
Le réchauffement climatique aggrave le problème de la faim, car il influence fortement la production de denrées alimentaires et leur disponibilité. Le changement climatique engendre aussi la soif car des pluies plus rares et irrégulières causent un stress plus grand pour accéder à l’eau et surtout à l’eau potable.
En cas d’augmentation de la température de 2.5°C, quelque 45 à 55 millions de personnes supplémentaires vont souffrir de faim et de malnutrition. Selon les experts, elles seront 65 à 75 millions au-delà de 2.5°C et 80 à 125 millions avec une hausse thermique de 3-4°C. Avec l’effet de serre global, les sécheresses et les inondations seront plus fréquentes, les ouragans plus intenses. Ces phénomènes ont un énorme potentiel de destruction, non seulement pour des bâtiments isolés ou des villes entières, mais également – même si c’est moins visible – pour les cultures.
Les denrées alimentaires sont un bien rare, ainsi que l’a montré la récente crise alimentaire. Celle-ci s’explique notamment par les raisons suivantes :
Sur le plan mondial, les céréales sont utilisées principalement comme fourrage pour le bétail.
Les céréales font l’objet, sur les marchés libéralisés, de spéculations par les grandes sociétés commerciales.
La recherche agricole nationale et indépendante a – sous la pression du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale – été abandonnée dans de nombreux pays et transférée à des firmes privées.
Des semences céréalières, aux mains de multinationales, ont été rendues dépendantes de produits chimiques et d’irrigation régulière ; elles ne sont plus adaptées à des sols pauvres et secs.
De nombreuses politiques agricoles et économiques ont négligé la paysannerie. Des denrées alimentaires sont transformées en agrocarburants dans une tentative illusoire de réduire les émissions de CO2.
La récente crise alimentaire est due à un cocktail fatal de libéralisations et de mainmises par les multinationales, nourrie de l’espoir de profits rapides dans des conditions climatiques en pleine dégradation. Ce mélange détonant a fait exploser les prix, causant rapidement la faim pour des millions de personnes au faible pouvoir d’achat. Dans le futur, les changements climatiques vont rendre plus fréquents les mauvaises récoltes et encore exacerber la volatilité des prix des aliments.
Subir! Sans moyen, sans soutien
Dans la majorité des cas, les personnes souffrant de faim et de malnutrition sont marginalisées. Bon nombre d’entre elles vivent dans des endroits éloignés, sans infrastructure adéquate. Même si elles ont accès à des terres cultivables, ces dernières sont souvent situées dans des endroits défavorables comme des escarpements sujets à de fortes pluies, ou encore dans des endroits secs, éloignés des systèmes d’irrigation. Faute d’informations et de moyens financiers permettant d’entreprendre des mesures d’adaptation au changement climatique, ces terres subissent de plein fouet les inondations ou les sécheresses et deviennent toujours plus difficile à cultiver.
Le respect des droits humains est bafoué
L’accès à la terre, à l’eau potable, à des semences et aux ressources naturelles est au cœur du droit à l’alimentation. Pourtant, un nombre croissant de personnes perdent l’accès à ces ressources vitales en raison de la destruction de l’environnement et du changement climatique. Les Etats ont l’obligation de respecter, de protéger et de donner effet aux droits des individus. Mais souvent, il y a un manque de volonté politique des dirigeants des pays du Sud pour réaliser le droit à l’alimentation des personnes les plus vulnérables et les protéger des conséquences du changement climatique. Cela est souvent lié au fait que les personnes concernées sont marginalisées et discriminées, sans aucune influence politique.
La communauté internationale doit agir
Face à la spéculation alimentaire et au réchauffement climatique, il est plus crucial que jamais d’insister sur le droit à l’alimentation et de l’exiger. Les personnes touchées par la faim et la malnutrition doivent être soutenues pour qu’elles puissent revendiquer une politique gouvernementale responsable et garantir leur accès à la terre, à l’eau et à d’autres ressources.
Selon le droit international, la communauté internationale est obligée de protéger les personnes vulnérables contre les effets négatifs du changement climatique, car celui-ci est responsable de graves problèmes d’alimentation. En outre, les pays industrialisés ont une responsabilité historique d’aider les personnes du Sud à s’adapter aux changements climatiques – car ce sont eux qui les ont provoqués principalement.
Pain pour le prochain, Action de Carême et Etre partenaires soutiennent les personnes vulnérables et marginalisées afin qu’elles puissent faire valoir leur droit à l’alimentation. A travers différents projets dans le monde entier, nos œuvres aident les petits producteurs et productrices à produire leur alimentation de manière écologique et durable et les associations paysannes à revendiquer leurs droits.
Un fonds spécial climat et développement a été créé pour la réalisation de projets spécifiques qui ont pour but de diminuer les conséquences négatives du changement climatique. Au niveau politique, nos œuvres exigent – dans leur campagne œcuménique au niveau national ainsi que dans les campagnes internationales des réseaux Aprodev et CIDSE – que les Etats s’engagent en faveur d’un protocole post-Kyoto qui les oblige à réduire les émissions de CO2 et à lutter ainsi contre le réchauffement climatique. Pain pour le prochain et Action de Carême demandent une justice climatique entre les pays industrialisés et les pays du Sud. Nous demandons à la population suisse de s’engager concrètement en réduisant leurs propres émissions de CO2 et en signant la Pétition Justice Climatique adressée au Conseil fédéral suisse.
Campagne internationale de CIDSE pour une justice climatique
CIDSE est un réseau international d’organisations catholiques de développement. Action de Carême est l’une des 16 organisations membres. Au cours de l’année 2009, les organisations membres de CIDSE et de Caritas réalisent une campagne publique sur la justice climatique : en signant des cartes postales et des pétitions électroniques, des milliers de personnes demandent à leur gouvernement de s’engager pour un protocole contraignant lors des négociations des Nations Unies sur le climat à Copenhague en décembre 2009.
Campagne internationale des œuvres protestantes: Countdown to Copenhagen
Aprovev est un réseau d’organisations de développement européennes lié au Conseil Œcuménique des Eglises. Pain pour le prochain est l’une des 17 organisations membres. Avec Pain pour le prochain et huit autres organisations protestantes, Aprodev a lancé la campagne internationale Countdown to Copenhagen. Chacun et chacune peut se joindre à la campagne en signant une pétition électronique qui sera transmise aux négociateurs lors de la conférence à Copenhague en décembre 2009. Cette pétition demande aux gouvernements des pays industrialisés de s’engager à réduire les émissions de CO2 pour maintenir le réchauffement climatique en dessous du seuil de 2°C et d’aider les pays du Sud à réduire leurs émissions et à s’adapter au changement climatique. Les participants de la campagne s’engagent également à améliorer leur propre bilan écologique.
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Texto original
Pain pour le prochain (PPP) - Service des Eglises protestantes de Suisse pour le développement, Av. du Grammont 9, CH-1007 Lausanne, SUISSE - Tél. : 021 614 77 17 - Fax : 021 617 51 75 - Suiza - www.ppp.ch - ppp (@) bfa-ppp.ch