La législation sur les rapports locatifs en Allemagne est très largement favorable aux locataires. Elle leur offre des armes efficaces pour se défendre contre des dynamiques de spéculation immobilière dans le secteur locatif.
C’est pourquoi les locataires allemands s’inquiètent d’une éventuelle harmonisation européenne dans ce domaine, qui pour eux se traduirait par un nivellement par le bas.
La politique du logement en Allemagne a fait le choix du marché : elle a toujours été plutôt orientée vers la réalisation d’un marché du logement dont de larges segments sont accessibles à la majorité de la population. L’idée de création d’un secteur du logement social à part entière, qui accueillerait les ménages qui ne peuvent se loger dans l’offre privée, a ainsi été laissée longtemps de côté.
C’est dans cette perspective que le législateur allemand a développé un cadre réglementaire qui fixe des rapports locatifs très favorables aux locataires : en limitant par exemple strictement les augmentations de loyers, la législation joue depuis longtemps un rôle de garde-fou contre les dynamiques spéculatives dans le secteur du logement.
Ce cadre réglementaire est notamment à l’origine de l’existence d’un marché locatif privé abordable pour une grande majorité de la population. Il sert aussi d’arme redoutable pour les locataires, qui peuvent se défendre efficacement contre la spéculation.
Des rapports locatifs régulés et favorables aux locataires
Les rapports locatifs (les relations entre les propriétaires et les locataires) sont extrêmement encadrés en Allemagne, dans un sens favorable aux locataires.
Ainsi, les baux locatifs sont à durée indéterminée : un locataire qui paye régulièrement son loyer et ses charges peut donc envisager de passer sa vie dans le même appartement, voire même de transmettre « son » appartement à ses enfants, puisque les baux sont héréditaires.
Les conditions dans lesquelles un propriétaire peut donner congé à son locataire sont strictement définies : elles sont limitées à la reprise du logement par le propriétaire pour y habiter et au non-respect du contrat par le locataire (notamment deux mois d’impayés de loyer).
Comme la hausse des loyers est strictement encadrée par l’Etat, le marché locatif ne subit qu’une spéculation limitée. Cela explique certainement un moindre attrait des Allemands pour l’accession à la propriété, puisque la condition de locataire leur procure une situation relativement stable.
Le loyer comparatif (Vergleichmiete)
La réglementation du niveau des loyers n’est pas la même dans les différents secteurs du logement. Le « loyer comparatif » (Vergleichmiete) ne concerne que le secteur du bâti ancien (c’est-à-dire construit avant la loi de 1956) et les nouvelles constructions (depuis 1956) qui avaient bénéficié d’un soutien public, mais qui au terme du remboursement des emprunts à l’Etat, retombent dans le secteur privé classique, et sont donc soumises à la même réglementation que le bâti ancien. Les détails de la réglementation des loyers dans le secteur du logement social sont à consulter dans l’article « Pourquoi le logement social est-il devenu plus cher que le logement privé ? ».
Après la Seconde guerre mondiale, la crise du logement, due aux destructions des bombardements alliés, pousse les pouvoirs publics à fixer eux-mêmes le niveau des loyers. Il est alors prévu de ne confier à nouveau la régulation au marché qu’à partir du moment où l’offre dépassera de 3 % la demande de logements. C’est le cas à partir du début des années 1960 : le plan Lücke « libère » les loyers qui doublent entre 1960 et 1970, alors que ceux du terrain doublent entre 1962 et 1969.
Une seule restriction majeure à la spéculation est instaurée : le « Mietspiegel » (miroir des loyers)
Ce cadastre des loyers fixe des seuils locaux dans l’augmentation des loyers sur la base de la valeur d’usage : le prix de location dépend pour l’essentiel de la taille, de la situation, de l’année de construction et de l’aménagement du logement. Le Mietspiegel a une double fonction : il reflète l’état du marché locatif dans une zone géographique et à un moment donné, et il encadre strictement l’évolution de ce marché, limitant les hausses éventuelles de loyers à ce qui se pratique déjà dans la zone. Il joue donc un rôle de rétro-contrôle.
Les hausses de loyer en cours de bail sont d’une part limitées par la valeur du Mietspiegel concerné et, d’autre part, ne peuvent pas dépasser 20 % sur trois ans. Toutes les hausses de loyer nécessitent l’accord des locataires. Les propriétaires peuvent toutefois aller en justice pour tenter d’obtenir les hausses autorisées.
Les loyers fixés pour les nouveaux baux, signés à l’occasion d’un changement de locataire, peuvent cependant dépasser de 20 % la valeur du Mietspiegel pour le logement considéré sans que l’accord des locataires soit requis. C’est pourquoi un changement de locataire est intéressant pour la plupart des propriétaires.
Les hausses de loyer liées à des travaux de modernisation dépendent de l’amélioration de la valeur d’habitation. La hausse ne peut pas dépasser les coûts réels et le propriétaire doit en établir le décompte détaillé. Les travaux de modernisation nécessitent également l’accord des locataires.
Le Mietspiegel : une arme efficace contre la spéculation
Le Mietspiegel est une véritable arme pour la protection des locataires : ils l’utilisent d’ailleurs largement, notamment grâce aux associations de locataires. Leurs avocats savent dire très rapidement si une hausse de loyer est légale ou non, et peuvent donc engager sans difficulté des poursuites contre un propriétaire indélicat.
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, Alemania
Lucie Lechevalier-Hurard a participé au programme de mobilité d’Echanges & partenariats (http://emi-cfd.com/echanges-partenariats7/…) avec comme partenaires l’AITEC et BMG.
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