Les quatre principales trajectoires de l’économie capitaliste définies par l’école de la régulation
04 / 2006
"Pourquoi tous les capitalismes ne se ressemblent-ils pas ? "
Il existe pour la Théorie de la Régulation, différentes trajectoires capitalistes, non pas qu’il y en ait autant qu’il y ait de trajectoires nationales mais que l’existence d’une convergence est en tout point à exclure. Boyer distingue donc quatre formes de capitalismes reposant sur 4 formes de régulation bien spécifiques :
Tout d’abord, il y a le capitalisme à régulation marchande, qui caractérise les économies étasuniennes et anglaises. La logique marchande en est le principe organisateur et influence substantiellement les institutions. Tout est fait pour permettre la flexibilité des différents marchés : décentralisation des négociations salariales, individualisation des rémunérations, législation anti-trust, financement par les marchés financiers, innovation dans le secteur des produits financiers. Il s’agit par conséquent d’une économie de forte adaptabilité, favorisant les innovations technologiques. Cependant on note son incapacité à se projeter ne serait-ce que dans le moyen terme provoquant ainsi un sous investissement notamment dans les infrastructures et une non prise en compte des problèmes liés à d’importantes inégalités engendrées par cette trajectoire capitaliste.
Boyer distingue également le capitalisme japonais à régulation dite méso-corporatiste ou qualifié encore de libéralisme paternaliste fondé sur la dynamique des grandes entreprises. Les unités de production y sont de grande taille et diversifiées quant à leur production, la logique prédominant étant celle de la complémentarité. Contrairement au premier type de capitalisme décrit, ici c’est le long terme qui est présenté comme principe fondamental : le compromis salarial est un compromis de long terme (stabilité du travail en échange d’un grand dévouement des salariés), le financement l’est également, tout comme les relations entre banques et entreprises ou l’intervention de l’Etat (infrastructures… ). Cette trajectoire a pour avantage de présenter une grande efficacité quant il s’agit de stratégie de remontées de filières et de concurrence qualitative. Cependant, la solidarité quasi institutionnalisée entre banques et entreprises peut engendrer des problèmes financiers importants ainsi que des erreurs stratégiques.
Vient ensuite le capitalisme social démocrate, plus précisément le corporatisme sociétal (que l’on pourrait rattacher à la Suède) ou encore le corporatisme libéral (rattaché cette fois à l’Allemagne). Le principe régulateur de base est le suivant : l’économie et la société sont régies par la négociation centralisée collective entre les partenaires sociaux. En contrepartie la compétitivité est acceptée comme postulat économique fondamental. L’intérêt de cette trajectoire capitaliste est son efficacité dans les stratégies dites de remontées de filière, mais aussi et peut-être avant tout les bénéfices sociaux qu’elle engendre : limitation des inégalités, importance du consensus, innovations en terme d’organisation et de vie sociale. Cependant, elle nécessite pour sa stabilité des marchés financiers plus traditionnels que ceux présents aujourd’hui.
Le capitalisme à régulation étatique ou publique qui caractériserait plutôt un pays comme la France. Ici, l’économie est façonnée par les interventions de la puissance publique. Les règles régissant le rapport salarial sont institutionnalisées, les politiques de crédit, les politiques monétaires définies par l’Etat. L’Etat n’est donc pas uniquement présent pour instaurer le dialogue ou pour investir là où le marché ne peut le faire mais il intervient à tous les niveaux de la vie économique… Ce modèle est particulièrement performant pour les phases de rattrapage ainsi que pour pallier les déficiences et inefficiences de marché. Cependant, il lui est excessivement difficile de s’ajuster aux nouvelles conjonctures quelles qu’elles soient, les institutions s’inscrivant dans un temps bien plus long que celui de des conjonctures économiques.
Économie, société et environnement : des éléments de réflexion pour une société durable
Libro
BOYER Robert, La politique et l’ère de la mondialisation et de la finance : le point sur quelques recherches régulationnistes, CEPREMAP-GERME, papier n°9820.
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