Monsieur Winterhalter, maire pendant vingt-quatre ans en Alsace, a mis en place une communauté citoyenne fondée sur la participation de tous. Dans ce cadre, il lutte contre la précarité et le chômage
12 / 2001
De 1977 à 2001, Monsieur Winterhalter a été maire de Lutterbach, commune de 6 000 habitants près de Mulhouse (Alsace, France). Durant ce mandat, il a mis en place deux collèges avec les autorités locales ainsi que la Maison citoyenne mondiale de Mulhouse. Son engagement, d’abord contre le nucléaire et l’armement, a évolué vers une lutte contre le chômage, la précarité et pour les exclus. Ses quatre mandats d’élu municipal et le soutien quasi unanime de ses équipes lui ont donné l’occasion de créer des associations, d’ouvrir des lieux de réflexion et une brasserie artisanale. Monsieur Winterhalter a également établi des partenariats avec d’autres villes : au Kosovo, en 1996 et en 1985, et au Nicaragua. Avec son équipe municipale, il fait la promotion de l’énergie renouvelable, déclare Lutterbach "zone dénucléarisée" et ville citoyenne du monde, fait ériger un monument à la vie sur lequel les armes sont transformées en fleurs. Aujourd’hui, il continue à mener un combat contre la précarité et mise énormément sur la participation citoyenne. Lors de la construction d’un immeuble de vingt-trois logements sociaux, il a par exemple demandé aux futurs locataires de participer à l’élaboration du projet. En outre, le système de solidarité et de communauté citoyenne qu’il a imaginé prône une grande intégration des chômeurs et des exclus.
Sa longévité à Lutterbach a été pour Monsieur Winterhalter une chance, puisque cela lui a permis de construire une politique et d’en suivre les effets. Cette dernière se heurte d’ailleurs à "l’embourgeoisement" de Lutterbach. En effet, la cité est devenue une ville très agréable à vivre, les prix des habitations ont donc augmenté et attiré des personnes n’ayant rien à voir avec les idées de départ. Si bien que les actuels habitants de Lutterbach ne veulent plus entendre parler de chômeurs ou de solidarité mondiale, mais plutôt de jeunes difficiles ou d’immigration. Ceci explique sans doute la défaite de Monsieur Winterhalter aux élections de 2001. Cette défaite lui a pourtant été bénéfique : elle lui a permis de se consacrer pleinement à son projet de Maison citoyenne. Cette maison est un lieu de rencontre et de débat entre citoyens autour de sujets divers. C’est un véritable "forum citoyen" à l’origine de la création d’une université populaire pour les personnes en difficultés. La Maison citoyenne tient compte de la nature multiculturelle de la société, elle accompagne les sans-papiers et souhaite relier les solidarités d’ici et de là-bas : par exemple, dans le cadre du partenariat avec le Kosovo et le Nicaragua, qui mènent les mêmes actions en faveur de leurs exclus. L’objectif final de la Maison citoyenne de Mulhouse est de devenir un centre de ressources sur l’économie sociale et solidaire et de mettre en place des structures d’insertion des chômeurs avec les entreprises.
Autre grand projet : créer une zone d’activités de 14 hectares en jumelant l’économie solidaire, l’artisanat, et la construction de maisons en bois. Ce projet émane d’un collège de bénévoles et de professionnels qui ne prend pas seulement en compte les chômeurs mais aussi les sans-papiers, les SDF, les toxicomanes. Le collège, dirigé par Monsieur Winterhalter, se heurte à une difficulté majeure : les précaires, en France et en Europe, sont démoralisés et ont souvent des problèmes de santé. Leur permanence dans l’effort est donc très difficile à obtenir, même si le collège continue à vouloir agir "avec eux" et non "pour eux". Des cahiers de proposition ont été élaborés, demandant l’application du droit au respect, à la justice, à une formation, etc., dans une tentative pour promouvoir une économie sociale et solidaire avec un revenu d’existence (allocation universelle proportionnelle au PIB de chaque pays : un "ticket pour la vie"). Monsieur Winterhalter développe de multiples contacts avec des associations (Cités unies, Fédération des villes jumelées, Citoyens du monde). Il a une volonté très nette de se mettre en réseau, de relier les expériences et fait un gros travail sur la citoyenneté mondiale. Son réseau sur la paix réunit élus, citoyens, techniciens qui dialoguent d’égal à égal. Tous ces réseaux sont déjà efficaces à Lutterbach mais reposent quasi exclusivement sur la bonne volonté de bénévoles, qui n’ont pas toutes les vertus du monde.
fight against unemployment, fight against exclusion, citizens network, community participation, citizen initiative, partnership, relationship between citizens and elected representative
, France, Alsace
L’apport des partenariats et la constitution de réseaux sont plus que certains. Ils constituent un réel contre-pouvoir et sont tripartites, puisqu’ils mettent en rapport les pouvoirs publics, les entreprises et les chômeurs, ce qui est très constructif pour notre société. Ils demandent toutefois des moyens de communication encore trop rarement privilégiés.
Contact : Roger Winterhalter - 8 avenue Auguste Wicky, 68100 Mulhouse, France - Tél-fax : 03.89.66.18.81 - r.winterhalter@ifrance.com
Fiche rédigée lors de l’Assemblée Mondiale des Citoyens de Lille, décembre 2001.
Entretien avec WINTERHALTER, Roger
Interview
Centre de Recherche sur la Paix - Institut catholique de Paris - 21 rue d’Assas, 75006 Paris FRANCE- Tel 33/01 44 39 84 99. - France - www.icp.fr/fasse/crp.php