Accompagner pour mieux réhabiliter : la pyramide 14 à Evry

A Evry, le quartier des Pyramides compte près de 10 000 habitants et le parc locatif social y est dominant. Avec ses 257 logements, le bâtiment 14, géré par l’OPIEVOY, est l’un de ses immeubles les plus imposants. En 1996, sa population était estimée à 750 personnes environ. A la base de la pyramide sont imbriqués des locaux associatifs, le collège et un foyer pour adultes handicapés. Sous la dalle se trouve une grande nappe de parking.

Comme les premières constructions de la ville nouvelle, réalisées dans les années 1970, le bâtiment 14 avait été conçu de façon à ce que les circulations s’effectuent très librement. Les couloirs partant de ses 4 ailes convergeaient pour se rejoindre au centre de la pyramide. Neuf entrées permettaient d’y accéder. Jusqu’à la fin des années 1980, ce mode de fonctionnement était visiblement très apprécié.

Mais, dès le début des années 1990, le quartier connaît un appauvrissement général et des difficultés de gestion (augmentation de la vacance et des impayés de loyer, etc.). Parallèlement, la très large accessibilité et le caractère labyrinthique du bâtiment facilitent le développement de nouveaux usages : circulations à mobylette dans les couloirs du rez-de-chaussée, trafics illicites, squats, tags et détériorations diverses.

Dans ce cadre, le bailleur et ses partenaires décident d’engager une opération de réhabilitation. Pendant deux ans, des réunions, enquêtes et permanences ont été organisées afin d’établir un programme, approuvé en 1997 par les locataires. Les travaux ont eu lieu d’octobre 1998 à mars 2000. La réhabilitation a d’abord consisté à compartimenter l’ensemble du bâtiment en entités distinctes. Ainsi, au rez-de-chaussée, des cloisons ont été érigées pour couper les communications entre les différentes ailes. Certains accès aux parkings ont été fermés. Les halls d’entrée sont donc aujourd’hui spécifiques, attribués chacun à une partie des locataires seulement, et pourvus d’interphones et d’un système de contrôle d’accès par badge magnétique. Ils ont été entièrement réaménagés (revêtements, boîtes aux lettres, éclairage, etc.).

Mais la réhabilitation n’avait pas uniquement pour objet les espaces collectifs. Des "travaux à la carte" ont eu lieu dans les logements. Chaque ménage a pu choisir parmi une liste de 17 possibilités ce qu’il préférait voir réaliser, à raison d’un coût maximal de 10 000 francs par logement (financés par le Conseil général). Ce principe a été largement apprécié et a permis de lancer le dialogue logement par logement pour faire en sorte que tous les locataires soient effectivement impliqués.

De plus, une mission de maîtrise d’oeuvre sociale a été confiée par l’OPIEVOY (et ses partenaires) à la société Médialto, chargée d’associer les locataires à l’amélioration de la qualité de la vie de voisinage pendant et après la réhabilitation.

Dans ce cadre, un appartement pédagogique a été aménagé pour, entre autres, aider aux choix des travaux à la carte. Médialto y tenait des permanences hebdomadaires.

Un atelier bricolage a été organisé avec le concours de plusieurs partenaires, dont l’association des locataires et l’association des habitants d’Evry I. Le samedi matin, il permet aux habitants d’emprunter ou louer du matériel afin d’effectuer eux-mêmes certains travaux, ou de demander une aide financière auprès des assistantes sociales de la CAF (achat de matériel ou travaux). Cependant, ce service a principalement été utilisé par les résidents en contact avec l’association de locataires et n’a pas toujours pu toucher les personnes les plus en difficulté.

L’appartement témoin a de plus servi à des rencontres organisées par Médialto et l’association des locataires : réunions d’information, accueil des nouveaux locataires, mise en relation des demandeurs d’emploi avec différentes instances des services de l’emploi, etc.

Par ailleurs, Médialto et l’association des locataires ont organisé des réunions invitant (par porte-à-porte) les habitants concernés par la première entrée réhabilitée, afin de définir les principes de fonctionnement que ceux-ci souhaitaient voir respecter. Des ateliers ont alors été mis en place avec l’aide du bailleur et du centre social. Ces ateliers - rassemblant quelques habitants dont certains membres de l’amicale - ont abouti à la rédaction d’une "Charte de bon voisinage" traitant des comportements convenables à adopter (politesse, propreté, calme, contrôle des accès). Un groupe de sept enfants, animé par un professionnel habitant le bâtiment, a été chargé de réaliser des dessins illustrant les différents aspects de la charte. Ces dessins ont ensuite été accrochés dans le hall d’entrée refait à neuf, à côté du texte de la charte, et présentés lors de l’inauguration. Les tableaux, une fois encadrés, sont restés à demeure.

Une démarche analogue a été suivie dans les trois autres ailes du bâtiment, au fur et à mesure de la progression des travaux. Ainsi, dans les deux premières ailes, plus de 50 pour cent des familles ont signé la charte, et celle-ci est présentée aux nouveaux entrants.

Mais cette initiative a en outre permis d’ouvrir de nouvelles perspectives. En effet, les enfants ayant illustré les quatre chartes ont pu rencontrer la Compagnie du Cercle, créée par un conteur et actuellement en résidence à la scène nationale de l’Agora, à Evry. Une seconde rencontre a réuni les parents, l’association de locataires et la Compagnie du Cercle. A cette occasion, l’idée d’organiser des soirées contes chez des locataires ou dans les écoles a germé... Et plusieurs rendez-vous chez des locataires de la pyramide 14 sont d’ores et déjà programmés pour la rentrée 2000.