Les progrès de la capacité de négociation de l’Entente de Diouloulou
03 / 1998
Pascal MANE, responsable en communication de l’Entente de Diouloulou raconte la première négociation puis les suivantes :
a/ Les premières négociation.
"Nous avons vraiment eu la chance d’avoir un coordinateur qui avait voyagé en Europe car nos partenaires étaient souvent européens. Je peux citer la CANA, Eaux Vives (France) et puis NCOS (Belgique). Dans les premières années de collaboration, nous on élaborait nos projets, on les soumettait, et ces projets étaient financés à moitié par eux. Chaque fois qu’une activité était réalisée, il fallait envoyer un rapport avant de pouvoir accéder à un autre financement. Ils disaient qu’ils voulaient un répondant et eux comme ils séjournaient dans les villages, ils nous ont proposé le répondant qui se trouvait être un membre de l’association.
Après, la première année, il y a eu une évaluation qui nous a permis de nous réorganiser et de trouver même quelques pistes pour une meilleure collaboration avec ces partenaires. Nous on a dit ceci : si le bailleur a donné son financement, ce n’est pas à lui de désigner son répondant, c’est à l’association de dire que le répondant c’est untel. Parce que nous, on avait déjà mis en place un comité de gestion, qui était composé des responsables d’activité ; s’il y avait a écrire un rapport et à l’amender, c’est au comité de gestion de le faire.
Ensuite, on leur a dit : ce sont les animateurs qui font tout pour le groupement, donc il faut des indemnités au moins pour ces gens-là. Là le bailleur s’est opposé, et nous nous sommes dit : si on doit travailler réellement avec le bailleur, il faudrait que l’on s’entende. Eux quand ils viennent ici, ils voyagent avec l’argent du projet où ils prélèvent des indemnités, alors il fallait que nos animateurs aussi aient au moins des indemnités afin de pouvoir vivre comme tout un chacun. C’est ainsi que l’on a eu à discuter avec le bailleur, qui a finalement compris la préoccupation des gens et qui est arrivé à indemniser au moins les responsables de la formation, de la gestion et le secrétaire général de l’association."
b/ Comment élaborons-nous, avec les groupements, notre programme aujourd’hui.
"Dans notre association, les membres ce sont les groupements, et le projet de l’association est fait en fonction de la demande des groupements. Parce qu’avant de négocier un projet, l’association fait une "tournée d’élaboration du projet", c’est à dire, on passe dans les groupements, on se renseigne pour ce qui est de l’obtention du financement. Après avoir collecté les besoins des groupements, ces besoins-là sont élaborés en projet pour l’association. A l’arrivée on fait une synthèse générale pour voir ce que les gens ont demandé et c’est à partir de là que nous élaborons le projet qui est soumis au bailleur. Si le financement d’un des projets est acquis, il suffit de regarder sur le répertoire des demandes des groupements. Alors, tout ce qui est demandé par un groupement et qui est déjà acquis est directement donné au groupement. Cependant, pour l’achat de matériel c’est souvent l’association parce que s’il faut donné au groupement, il y a le problème de transport qui coûte cher ; de son côté l’association a les moyens de transports de même pour les semences, etc..."
c/ La rectification, la négociation et l’évaluation du programme.
"L’association établit son programme et si le bailleur ne peut pas intégralement financer, alors le comité de gestion ne peut pas prendre immédiatement d’autres décisions, parce qu’il est mandaté par le conseil d’administration qui a décidé : "Nous avons besoin de faire cela encore car c’est la demande des groupements de base." Donc, quand après le recensement des besoins, le bailleur dit : "Moi je peux peut-être prendre cela mais pas ceci", il va de soi que le comité de gestion retourne au niveau des groupements de base pour dire : "Le projet que nous avons élaboré n’a pas été financé parce qu’on n’a pas trouvé un terrain d’entente". Le comité de gestion ne peut en aucun cas accepter la décision du bailleur si cela n’a pas d’intérêt pour la base. Donc on ne pourrait pas non plus accepter un budget qui va au-delà de ce que les groupements ont demandé. C’est pourquoi la décision en ce moment est toujours étudiée au niveau de C.A. (Conseil d’Administration).
Le suivi et l’évaluation des projets se fait à trois niveaux. Je prends l’exemple de l’ONG belge NCOS qui travaille avec nous : tous les 2 ans NCOS descendait à la base dans les villages et les groupements de l’Entente, il fait d’abord un première tournée, voit les réalisations et ensuite, en synthèse ensemble, on fait l’évaluation. Donc, NCOS est là une semaine durant ; ils viennent souvent avec une mission composée d’un journaliste de l’ONG, d’un gestionnaire, le président et le trésorier. Pendant une semaine, on fait l’évaluation.
Par contre un autre système de suivi se fait avec la ligne de crédit de SOS FAIM. Là c’est le cabinet de APCO qui vient faire le suivi ; ils descendent tous les deux mois à la base pour faire le contrôle et le suivi des actions. A la fin de l’année, on fait le bilan des activités."
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, Senegal, Diouloulou
Le récit clair de la progression d’une des capacités d’une organisation paysanne. Au début de sa relation avec cette dernière, une ONG du Nord veut désigner, dans chaque village, son correspondant. Bien sûr, l’organisation paysanne qu’anime la zone va se battre pour que son propre dispositif soit respecté par le donateur. Peu à peu, sa capacité de négociation s’élargit et après 10 ans, elle gère l’ensemble d’un programme qu’elle a elle-même élaboré avec chacun des groupements membres et négocié avec plusieurs partenaires. Elle utilise pour le contrôle de gestion les services d’un bureau indépendant d’expertise comptable ; et elle accepte que les ONG descendent sur le terrain pour évaluer les actions en équipe avec elle.
Entretien avec MANE, Pascal réalisé à Ziguinchor en mai 1998.
Interview
OUEDRAOGO, Baba
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