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dialogues, proposals, stories for global citizenship

L’auteur de la capitalisation d’expérience livré à lui-même : un vrai problème méthodologique pour Madera

Jean FREYSS, Sylvie ROBERT

12 / 1999

MADERA est une ONG qui est née de l’action politique. Nous avons fait appel à Jean-Pierre Turpin, qui était lui-même un compagnon de toutes ces époques, de toute cette histoire, de ses débuts surtout, de 1980 à 1990. La capitalisation a été commencée en 1993, 1994. On est en 1999, et elle n’est toujours pas terminée.

Parmi les thèmes : identité de l’organisation, lien politique et action du développement, la question de la construction de la paix et la question dans la pratique, comment on fait du développement quand on est une ONG. Ça faisait plusieurs grands axes auxquels se sont ajoutés ensuite, par la recherche et l’utilisation faite par Jean-Pierre d’une thématique un peu secondaire, je pense, qui est la question de l’articulation d’une équipe de salariés d’une organisation et de son équipe de direction, le fameux problème du terrain et de la direction.

La mise en ouvre : il y avait quelques axes qui se dégageaient et Jean-Pierre Turpin a fait des interviews, rassemblé des documents et il a structuré son travail. Mais il n’y a pas eu de véritable équipe d’accompagnement pour Jean-Pierre. C’est peut-être un des premiers problèmes méthodologiques. C’est à dire qu’une capitalisation doit à mon sens être effectivement relativement subjective, c’est à dire que l’auteur doit s’y impliquer, mais ça ne veut pas dire qu’il doive faire ça tout seul. Il pilotera complètement tout seul mais il a besoin de temps en temps de se repositionner. Or de ce point de vue là, le dispositif concret a été très insuffisant. Donc je crois que l’un des premiers problèmes concrets que l’on a eu sur cette capitalisation, c’est le fait que Jean-Pierre n’a pas bénéficié d’une chambre de résonance, d’un lieu où il pouvait véritablement avoir du répondant.

Là, il y a un problème délicat. Il ne faut pas que l’auteur de la capitalisation soit un nègre, en somme, d’une équipe qui va lui dire ce qu’il doit écrire, mais il ne faut pas non plus le laisser comme ça dans la nature. Dans le cas concret de MADERA, il a vraiment été laissé dans la nature.

La méthode de concertation qu’a eu Jean-Pierre pour le suivi de son travail était de nous remettre aux uns et aux autres de façon un peu décousue des chapitres. Mais moi-même, je n’ai jamais eu la totalité, je n’ai jamais eu une version avec un début et une fin, ce qui rend d’autant plus difficile l’association, la cohérence, le suivi, les enchaînements, etc. Je ne sais pas ce que ça va donner, je n’ai pas encore lu les dernières sections d’une dizaine de pages. Michel Veron ou moi, on a relu tous les bouts à différentes époques et à chaque fois on faisait des remarques, on disait ’ non pas ça, ou ça ’, mais en plus à aucun moment on a eu une vue d’ensemble véritable.

Est-ce qu’on a essayé de l’infléchir, de l’aider? Oui un peu, mais il reste que là on est sur une contradiction, une difficulté entre l’autonomie que doit avoir l’auteur si on veut qu’il produise quelque chose qui ne soit pas un patchwork d’influence des uns et des autres, et le fait de l’aider quand même, de l’orienter, d’infléchir son travail. Là, il y a vraiment un point de handicap, c’est pour ça qu’un comité de pilotage, un comité de suivi dont la fonction est bien définie, peut sans doute mieux jouer le rôle que ce genre d’influence qu’on pouvait avoir par proximité avec lui...

En janvier, Jean-Pierre avait estimé avoir terminé la rédaction dans sa forme complète. Il y a eu beaucoup de critique, beaucoup de réticence. Pendant le premier semestre 1999, sur la base d’indications un petit peu décousues, il a essayé d’améliorer les choses, et puis en juin, je crois, la Fondation pour le progrès de l’homme a pris la décision de demander à Anne-Sophie le remaniement sur le texte... Ce n’est pas un comité de pilotage que fait Anne-Sophie, c’est un travail de comité de rédaction, c’est à dire relire, en disant non là, il y a des tunnels, on n’en sort pas, il faut couper...

Jean-Pierre était à la fois trop dedans et pas assez impliqué sur la dernière période. Il y a aussi que ses préoccupations personnelles le portent plus à l’analyse politique d’une part et à l’interpersonnel d’autre part que par exemple à la problématique du développement. C’est un domaine qu’il connaît mal ou même pas du tout.

Je crois que l’un des problèmes majeurs que je rencontre maintenant, c’est que les thèmes clé de l’expérience à capitaliser ressortent de problématiques qui doivent être pour l’auteur de la capitalisation au coeur de ses préoccupations. Il faut être concerné par la problématique ou les problématiques centrales de l’objet capitalisé, même si on ne connaît pas forcément bien...

En résumé, les points d’entrée importants :

1)Les problèmes de comités de suivi, d’accompagnement de l’auteur ;

2)Le choix du profil de l’auteur par rapport au sujet de l’expérience elle même et/ou sa proximité aux problématiques de l’expérience ;

3)Et puis il y a le problème de qui et comment se fait, qui fait et comment on fait la fixation des objectifs finaux du travail de capitalisation.

Je crois qu’il y a un problème de ciblage. Avant même le ciblage il faut à la fois voir quelle est la conjoncture des idées, quels sont les points qui sont les plus problématiques, les plus débattus, et voir dans l’expérience ce qui peut s’y rapporter, faire ce travail d’adéquation entre la qualité de l’expérience et la nature des débats existants.

C’est une expérience qui est loin d’être pleinement satisfaisante. Dans le processus de production, avant d’arriver à la phase où on publie, il faut toujours garder 15 jours de plus, considérer que c’est fini 15 jours plus tôt, parce que les 15 derniers jours il y a une valeur ajoutée considérable en général, c’est là que les choses définitives se mettent en place.

Ce que je pense être une bonne capitalisation, c’est une capitalisation dans laquelle la production même de capitalisation est un élément de mise en mouvement de la structure, de l’

Key words

methodology


,

Notes

J. Freyss est socio-économiste, actuellement en poste à la Mission interministérielle au co-développement et aux migrations internationales.

Source

Interview

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