Le projet Khoj
05 / 1999
Sabrang Communications a été fondé à Bombay à la suite de la destruction de la mosquée Babri Masjid par des fondamentalistes hindous, en décembre 1992. Cet organisme développe des initiatives variées de prévention et de lutte contre le « communalism », terme issu de l’anglais indien qui désigne des sentiments de rivalité et de mépris, parfois de haine entre communautés ethniques et surtout religieuses, notamment entre hindous et musulmans. Il publie le mensuel « Communalism Combat » et diffuse des documents concernant les violences entre communautés et leurs conséquences sur les droits de l’Homme. Parmi ces initiatives, il pilote depuis juin 1994 un projet d’éducation laïque « Khoj » auprès d’enfants des écoles et d’enseignants bénévoles. En effet en Inde, l’éducation est le secteur principal que le gouvernement tente de manipuler : depuis 10 ans, sous l’influence des idéologues politiciens hindouistes, on constate une orientation cynique des programmes scolaires et, en particulier des manuels d’histoire, afin d’entretenir des préjugés discriminatoires.
Des programmes scolaires alternatifs
Le projet Khoj met en place, progressivement, une série de modules d’éducation à la tolérance et à la laïcité. D’abord expérimenté dans trois écoles privées de Bombay auprès des élèves, des professeurs, des directeurs d’école et des parents d’élèves, ce projet s’est poursuivi, avec l’autorisation de la municipalité de Bombay, dans 25 écoles publiques. Au total, 3500 enfants ont été concernés par ces tests dans des environnements socio-économiques et religieux différents.
Ce programme fonctionne selon une pédagogie interactive entre les élèves et les enseignants. Il porte sur une série de thèmes : l’Inde, le Pakistan, la paix, les différences religieuses… Son objectif est de donner à l’enseignant les informations et les connaissances nécessaires pour aborder le thème, ainsi qu’une démarche pédagogique lui permettant de répondre aux questions des enfants et de les faire réfléchir sur leurs propres représentations et sur leurs stéréotypes. Dans ces modules, une centaine de questions sont posées et des réponses y sont apportées.
Dès le lancement du projet, les enseignants ont montré un vif intérêt pour cette démarche, quels que soient la langue d’enseignement (hindi, marathi, ourdou) et le milieu social.
Repenser l’enseignement de l’histoire
Sabrang Communications compte aussi créer de nouveaux manuels scolaires d’histoire. Des professeurs d’histoire et des historiens se sont associés pour étudier une nouvelle façon d’enseigner cette discipline, non-alignée sur le programme officiel qui déforme ou tronque la réalité. Celle-ci doit être abordée sous divers angles : aspect humain et social, aspect géographique en étudiant par exemple l’origine des frontières et des divisions… L’enseignant a besoin d’un matériel de base et de contenus nouveaux.
Un module est déjà terminé. Il a pour objet de faire réfléchir ensemble enseignants et enfants sur les histoires de leur famille, leur histoire personnelle et celle de leur pays. Un livre et une bande dessinée sur les stéréotypes ont également été édités. Parallèlement, un séminaire d’enseignants s’est tenu à Bombay sur le thème de « l’histoire et ses altérations ». A la suite de cette rencontre, une association de professeurs d’histoire s’est formée.
Dans le prolongement de cette conception d’une histoire vivante, Sabrang Communications a proposé de célébrer le cinquantième anniversaire de l’indépendance de l’Inde, un an avant la date officielle de la partition, en août 1947, pour souligner que l’Inde n’a pas toujours été figée en deux communautés hostiles. Cette célébration anticipée a pour but de donner aux enfants la possibilité de se forger eux-mêmes une idée de leurs « voisins », les Pakistanais.
1998 marque la fin de l’étape d’expérimentation et de recherches. La nouvelle phase de travail concerne la rédaction des modules et des nouveaux manuels. En mai-juin 1999, les 15 modules pour les enfants de 10 à 12 ans seront achevés. Pour les manuels d’histoire, il faudra attendre plus longtemps, car leur conception est délicate tant au niveau du contenu que de la présentation.
Programme d’échange de correspondance entre élèves du Pakistan et de l’Inde : l’Aman Peace Pen Friends
Sabrang Communications met en ouvre un autre projet depuis 1996, celui de faire correspondre des enfants pakistanais et indiens. Cette opération, baptisée « Aman », ce qui signifie branche d’olivier, veut être une réponse aux relations conflictuelles entre ces deux pays depuis la partition en 1947.
Le Forum indo-pakistanais de février 1995 à Delhi et les deux Conventions qui lui succédèrent, en novembre 1995 à Lahore et en décembre 1996 à Calcutta ont permis de faire entendre d’autres voix que celles, belligérantes, des dirigeants et de forcer ces derniers à les écouter. Ce fut l’occasion de nouer des premiers contacts.
Les 14 et 15 août 1996, en signe symbolique, des élèves de Bombay et de Karachi ont prêté serment ainsi : « la paix est la seule façon pour les peuples et les pays de vivre en bon voisinage, dans l’amour et sans la guerre ». Depuis, un échange de correspondance, malgré les difficultés des liaisons postales et téléphoniques, a commencé entre les jeunes de l’École internationale de Bombay et l’École d’études supérieures de Karachi ainsi qu’entre des enfants des quartiers pauvres de Tussawadi et de Lahore. Tous les mois, Sabrang Communications consacre dans son magazine, Communalism Combat, deux pages à cette initiative. Communalism Combat est envoyé à 5000 écoles en Inde et à 7 au Pakistan.
A la suite d’articles parus dans cette revue et dans la grande presse, des demandes individuelles de jeunes Indiens désirant entretenir une correspondance avec des Pakistanais sont parvenues à l’association qui a constitué une banque d’adresses et qui s’efforce de garder le contact avec ces jeunes et de suivre leur parcours. En 1997-1998, des étudiants de Karachi et de Bombay ont pris part à un programme d’échange comprenant, dans les deux sens, une semaine de visite et une semaine d’enseignement.
culture of violence, religion and violence, citizenship education, training programme, school, young person, cross cultural dialogue
, India
Cette fiche a été rédigée à la suite d’une rencontre avec Teesta Setavald, responsable de Sabrang Communications. Pour plus d’informations Catherine Gaudard, Frères des Hommes, 9 rue de Savoie 75006 Paris, France - Tél. : 33/(0)1 55 42 62 62
Khoj. Education for plural india : Exploring prejudice teaching tolérance
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