Gérer les distorsions entre le programmé et le réalisé
03 / 1998
Cette rencontre de Barcelone, en décembre 1997, a la caractéristique particulière de s’inscrire dans le cadre de l’Assemblée 97 de l’Alliance pour un monde responsable et solidaire, à savoir : une organisation en plusieurs lieux de rencontres reliées entre elles par internet mais surtout se voulant un temps de réflexion simultanée d’un grand nombre de personnes sur les mêmes thématiques.
L’interconnection de plusieurs rencontres simultannées ou le risque de lier des dynamiques différentes
A Barcelone la notion d’être un élément d’un tout était parfaitement présente dans les esprits, sur toute la durée de la rencontre. Par contre cette appartenance "communautaire" ne se traduisait pas par une grande curiosité ni attente de ce que pouvaient bien faire les autres alliés ailleurs dans le monde. L’arrivée des synthèses électroniques ne faisaient pas l’objet d’une grande attention et le préposé à l’envoi de nos propres synthèses devait se sentir assez seul dans sa démarche de partage. Nous avons voulu comprendre la raison de ce manque d’enthousiasme malgré l’intérêt de départ des participants pour cette initiative d’échanges. L’unique raison fut le manque de temps : les débats entre les présents étaient assez intenses et intéressants pour se prolonger au-delà des sessions de travail de façon plus informelle, et ne laissaient malheureusement pas de temps pour se pencher sur des messages venus d’ailleurs. Il était perceptible que les participants n’avaient pas très envie d’être interrompus dans la logique de leurs propres échanges sur place et encore moins dans l’intimité forte qui les soudait entre eux. Chacun envisageait plutôt de reprendre calmement les messages des autres rencontres après l’Assemblée, une fois rentré chez soi. Cet état d’esprit était malgré tout légitime et montre seulement que la rencontre de Barcelone n’était ni vide de contenu ni ennuyeuse.
Fallait-il alors imposer un processus de mutualisation quotidienne ? Personne ne s’est risqué à le faire car la réussite d’une rencontre est quand même très fragile et on ne tente pas un processus différent au risque de rompre le charme et la bonne marche de la présente. Une rencontre est une opération alchimique à durée limitée et à chaque fois unique. Si les ingrédients réunis changent le
désert en jardin pour quelques jours, on ne se risquera pas à y faire surgir des montagnes.
Pour un ordre du jour souple ou la capacité de s’adapter aux participants
L’autre élément important à noter et qui a été flagrant lors de la rencontre de Barcelone est que le déroulement d’un processus de débats et d’échanges ne peut pas être bouclé ni à l’avance, ni à distance. Une rencontre, en effet, se forge par les caractéristiques des participants : c’est une somme d’individualités à un moment et dans un lieu donné, donc dépendante de nombreux facteurs
insaisissables. Le programme établi à l’avance doit toujours pouvoir être modifié de façon à s’adapter à ce qu’émane l’ensemble des personnalités réunies.
L’équipe du Centre pour l’Innovation Sociale, organisatrice de la rencontre, a été fortement perturbée de ne pas pouvoir faire admettre un programme et des prémisses qui avaient été pensées par le responsable, absent de surcroît de Barcelone. L’équipe se sentait donc responsable de mener à bien un processus qui devait aboutir à des conclusions et à des initiatives préétablies mais qui lui échappaient et que le groupe remettait en question. Les idées que l’on peut avoir sur l’intérêt d’une rencontre, sur quoi elle peut déboucher et le meilleur rendu qu’elle peut avoir, doivent également avoir une grande souplesse d’adaptation et d’ouverture à ceux qui vont en tisser le profil. Il a fallu un peu de temps à l’équipe d’organisation pour se rendre compte que l’absence du concepteur était une raison suffisante pour dépasser leurs doutes de bien faire, et rendre à cette rencontre sa raison d’être. Ce devait être la rencontre des participants et non un cours ou un exercice imposé. Il est amusant de noter que, tout compte fait, le groupe est parvenu aux mêmes conclusions mais seulement en fin de rencontre comme aboutissement logique de la démarche développée ensemble tout au long de la rencontre. Le processus d’appropriation par le groupe était nécessaire et vouloir imposer un état de fait au départ en pensant que la rencontre consisterait à en donner les explications, était un processus inversé inadéquat.
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, Europe, Spain, Catalogne
La participation à distance avec d’autres rencontres qui se font simultannément, pour enrichir la rencontre en cours, est très risquée, comme l’illustre bien la rencontre de Barcelone. Les animateurs ont fait là le choix de ne pas mettre l’accent sur cette communication à distance pour privilégier la qualité de la rencontre sur place. On le voit clairement, la condition première pour qu’une telle expérience soit une réussite est bien la gestion du temps. On ne peut, dans une rencontre dont l’agenda est déja chargé pour une dynamique de réunions sur place, inclure des temps de travail pour communiquer à distance et participer à des rencontres qui se déroulent en d’autres lieux. La deuxième condition pour la réussite d’une expérience de communication à distance entre plusieurs rencontres simultannées est que le travail préparatoire avec les participants ait été suffisamment conséquent pour que les participants soient déjà bien au courant de la démarche et de son fonctionnement avant même le moment de la rencontre, sans quoi le temps consacré à cette initiation pendant la rencontre réduit le temps de travail sur le thème de la réunion.
Le commentaire de cette fiche a été rédigé par Lydia Nicollet. Lieu et équipe organisatrice de la rencontre de Barcelone : Centre Innovation Sociale, tel +34 93 586 60 19, email cis@troc.es
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