Maria Teresa AQUEVEDO, Andrés PEDREROS
12 / 1998
En 1986, le Dr Nathan Kamliot, confronté à un important besoin dans le domaine de la santé orale, et au vu de la faiblesse des moyens au Salvador, a formé et délégué à un groupe de paysans les soins des besoins les plus urgents de la population de la région : extraction, prévention et éducation pour la santé. La réponse immédiate face à la demande de la population et la reconnaissance qu’ont connue les artisans dentistes a créé une dynamique communautaire enthousiaste et participative. Les artisans dentistes paysans sont formés pour répondre aux besoins de santé orale de leur communauté et pour diffuser l’expérience en vue d’assurer les soins d’environ 200 000 personnes au Salvador, au Guatemala et au Nicaragua. Le cas du Nicaragua est celui qui se rapproche le plus de l’objectif principal du projet, c’est-à-dire d’une implication communautaire dans la recherche de solutions aux problèmes de santé.
Au nord de ce pays, à Waslala, trois projets communautaires se sont joints en adoptant le modèle de fonctionnement du projet dental afin de créer une coopérative de santé : la maternité (qui donne des soins materno-infantiles gratuitement), un réseau de pharmacies populaires (qui offre des médicaments importants à bas prix et finance les activités de la maternité et celles de la dentisterie), le module de formation de dentistes populaires, qui se développe en trois étapes, dont la première consiste à encourager la promotion sociale et non individuelle des habitants. Les principes sont la participation de la communauté et la diffusion de l’expérience dans d’autres endroits. L’idée de base est que les paysans continuent à cultiver la terre et qu’ils puissent subvenir à leurs besoins de santé.
La première expérience s’est déroulée dans une communauté organisée afin de faciliter la diffusion du projet et son développement. La formation d’artisan dentiste a une durée de deux ans, et est divisée en trois spécialisations : extraction de dents, prévention-traitement de caries et fabrication de prothèses. Ils apprennent en travaillant, les aspects théoriques sont introduits au fur et à mesure que les difficultés apparaissent. Cette formation est délivrée par des dentistes professionnels nationaux et/ou français, avec l’appui de l’association DESPAC (Association Promotora del Desarollo Comunitario para Centro América).
L’organisation en coopérative de santé en tant que structure communautaire et autogérée, d’origine populaire, est un modèle original qui mérite une attention particulière. D’autres municipalités espèrent avoir bientôt leur propre coopérative de santé. Plusieurs personnes ont commencé à se former pour devenir dentiste, pharmacien, sage-femme ou promoteur de santé populaire, pour ensuite se constituer en coopérative de service. Les risques de dérive financière sont structurellement limités en raison des budgets restreints, contrôlés par des petites unités autonomes, puis par l’ensemble des membres de la coopérative.
Cette coopérative constitue un modèle original d’intervention qui offre à la population une possibilité d’accès à des soins primaires de bonne qualité. Elle est à la mesure des moyens et des besoins des Nicaraguayens. Les chances de pouvoir agir favorablement et durablement sur la mortalité et la morbidité des populations desservies sont réelles.
Deux coopérants sont à l’origine de ce projet. A moyen terme, le transfert de la totalité de la gestion et de la structure (maternité et dentisterie)aux membres de la coopérative doit s’effectuer. Cependant, la participation des coopérants reste décisive.
Actuellement, le projet continue à se développer seulement au Nicaragua, en accord avec les principes d’origine. C’est ainsi que la DESPAC disparaît peu à peu... Avec les accords de paix, on s’est un peu éloigné des objectifs de départ. Le docteur s’est retiré du projet et l’a laissé entre les mains d’ONG locales qui continuent à être financées par la CCE; il s’est installé à Waslala et même si la coopérative est une entité en soi (avec un bureau administratif chargé de prendre des décisions), les relations avec les agences et l’aspect financier sont uniquement du domaine de son épouse alors que lui-même n’est pas membre de la coopérative.
Dans ce cadre, les membres de la coopérative s’occupent de la gestion quotidienne, mais des choix les plus importants, tels que les relations avec les institutions nicaraguayiennes, sont contrôlés par le docteur. Le processus de transmission de la direction et des pouvoirs n’est pas en train de se faire. Ainsi, on ne sait pas ce qui va se passer si le docteur part, puisque les membres de la copérative n’ont pas appris à gérer les relations ni les méthodes d’achat de produits (pharmaceutiques, par exemple). La mise en place de stratégies, de normes juridiques, de fonctionnement des structures de santé, les demandes d’autorisations afin d’être reconnu légalement, l’achat de terrains ne se font qu’en fonction de l’avis du docteur. Il n’y a pas d’échange, de discussion avec les membres de la coopérative, ni de calendrier de transmission des responsabilités. Il serait intéressant de savoir quand et de quelle manière vont être transmises les responsabilités de l’achat et de la vente des médicaments, les relations avec les agences, et la coordination avec des institutions et avec les autorités locales.
En juillet 1996, une évaluation a permis d’identifier tous ces problèmes. Il faudrait que les bailleurs de fonds, en plus d’attribuer les fonds, puissent assurer le suivi, l’évolution et le développement du projet dans les domaines de méthodologie et des impacts.
public health, cooperative, agricultural popularization
, France, Nicaragua
Contact : CIMADE, 176 rue de Grenelle - 75007 Paris / Tel : 01.44.18.60.50 / fax : 01.45.55.72.53 / E.Mail : cimade@globenet.org
Entretien avec Felicia Mediva, responsable du suivi du projet. Consultation du dossier du projet (1995-1996
Interview ; Internal document
//
CEDAL FRANCE (Centre d’Etude du Développement en Amérique Latine) - France - cedal (@) globenet.org