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Les réseaux d’entreprise

Le développement des réseaux d’entreprise doit-il être lu comme le déclin de relations simplement contractuelles en faveur de relations fondées sur la confiance, l’échange, l’ajustement mutuel, ou comme une régression vers des formes archaïques dont le pouvoir est d’autant plus inquiétant qu’il est plus diffus?

Elisabeth BOURGUINAT

10 / 1998

Les approches académiques classiques dessinent les réseaux d’entreprise comme un centre relié de façon contractuelle et temporaire à des satellites ; ces relations peuvent prendre différentes formes (la sous-traitance, les franchises, les joint-ventures...). Selon la théorie de l’économie des contrats, développée par Williamson, les relations interentreprises s’établissent ponctuellement à travers un contrat opportuniste, à durée limitée, qui entraîne des coûts de transaction ; la relation ne perdure que si ce coût reste inférieur au prix d’une intégration verticale.

Mais Gianni Lorenzoni (Université de Bologne)pense que le fonctionnement en réseau constitue une vraie rupture par rapport à cette théorie : selon lui, l’étude des réseaux montre, d’une part, que les relations interentreprises ne reposent pas toujours sur des contrats formels et s’avèrent néanmoins performantes, et, d’autre part, que les réseaux s’appuient sur de nombreuses relations stables dans la durée. Au fur et à mesure que les relations interentreprises se développent, les unités périphériques prennent de plus en plus d’importance jusqu’à ce que le réseau comprenne plusieurs entreprises moteurs. Le réseau polycentrique peut alors être décrit comme une " organisation pétillante " dans laquelle les initiatives de toutes origines permettent d’échapper à la sclérose.

Même des pays comme les Etats-Unis, qui sont les champions de la relation contractuelle, sont selon lui contraints de développer, sous la pression de la concurrence, des organisations en réseau qui privilégient la notion de confiance par rapport à la pratique du contrat : le contrat ne règle que ce qui est prévisible, et se révèle insuffisant dans une situation largement marquée par l’incertitude.

Key words

company network, business management, world wide extension, mafia


, , Taiwan, China, Eastern Europe

Comments

Ce texte laisse le lecteur un peu sur sa faim : à part des formes " traditionnelles " de réseau comme les franchises, qui reposent sur des relations éminemment contractuelles, l’orateur donne peu d’exemples des séduisantes relations de confiance, d’échanges d’informations fréquents et réciproques, d’anticipation et d’ajustement mutuel, dont il fait l’apologie. Il regrette d’ailleurs lui-même qu’il y ait peu d’études sur la question, et on finit par se demander de quoi l’on parle au juste.

Sans doute G. Lorenzoni pense-t-il surtout à ces réseaux de petites entreprises où l’on travaille entre proches (pères/fils, cousins, amis de longue date, etc.), et qui sont très répandus en Italie. Est-ce parce que ces structures, probablement très variables d’un cas à l’autre, se prêtent peu à la formalisation et à la description, qu’il n’en dit en réalité pas grand chose ?

En tout cas, peut-être à cause du caractère assez imprécis de la présentation, ce thème semble avoir éveillé chez les participants une profusion de fantasmes, qui vont de l’angoisse de voir se dessiner de nouvelles mafias, au rêve de retrouver une société composée de grandes familles et de tribus.

Personnellement, je me demande s’il faut considérer cette évolution comme une avancée ou comme une régression. L’orateur souligne que l’organisation en réseau convient particulièrement aux pays qui se développent, comme Taïwan, la Chine, les pays d’Europe de l’Est : pour se développer vite et avec peu de moyens, il faut trouver des ressources hors de l’entreprise et partager des idées. Etant donnée la crise que connaissent, de façon plus ou moins aiguë, même les pays les plus développés, on pourrait considérer que d’une façon générale, l’organisation en réseau est adaptée à la mondialisation.

Mais ce qui peut paraître inquiétant, comme le traduit la comparaison avec la mafia proposée par l’un des participants, c’est la façon dont le pouvoir est géré dans ce type d’organisation, où l’on peut craindre que la notion de responsabilité ne se dilue complètement : comme le dit un des intervenants, les frontières organisationnelles et les frontières juridiques ne coïncident plus.

D’autre part, si l’on songe à ces organisations " en réseau ", d’un tout autre ordre évidemment, qui permettent la survie, chez nous, des petites " épiceries arabes " de quartier, connues pour leurs heures d’ouverture extensibles, on peut craindre que le développement de ce type de structures extrêmement souples ne coïncide avec le recul des droits et de la protection de chaque individu : quand vous êtes pris en charge par une " famille " ou une " tribu ", qu’importe si vous n’êtes pas personnellement couvert par des assurances sociales et si vous ne touchez pas personnellement un salaire ? Comment pourriez-vous refuser de travailler aussi longtemps que votre employeur vous le demande alors qu’il vous accorde sa pleine et entière protection, et que par ailleurs c’est votre oncle ou votre cousin ? De telles dérives ne sont-elles pas à craindre également au niveau des réseaux d’entreprises ?

Source

Colloquium, conference, seminar,… report

LORENZONI, Gianni, CHEVRIER, Sylvie, Ecole de Paris de Management, Les réseaux d'entreprise : étoiles éphémères ou tribus pérennes ? , Association des Amis de l in. Les Annales de l'Ecole de Paris, 1996 (France), II

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