Le drame de la prostitution enfantine liée au tourisme dans certains pays du monde a été constaté depuis un certain nombre d’années. Partout où elle sévit, la prostitution enfantine est en augmentation. Dans certains pays, elle n’était pas étrangère à certaines pratiques traditionnelles. Dans d’autres, c’est un phénomène tout à fait nouveau. Ceux qui en sont les clients appartiennent à plusieurs catégories : il peuvent être des pédophiles "culturels" appartenant à des milieux se recommandant d’un certain esthétisme, ou des pervers qui trouvent dans le tiers-monde des occasions moins risquées de pratiquer leur perversion. Ce peut être enfin des pédophiles occasionnels qui, attirés par les formes les plus extrêmes du laxisme auxquelles le tourisme donne lieu, répondent aux invitations parfois à peine voilées des publicités touristiques.
Ceux qui profitent de la prostitution enfantine peuvent être soit des petits proxénètes locaux, eux-mêmes anciens enfants prostitués, soit des membres de réseaux internationaux, soit ceux d’une véritable maffia internationale, la frontière entre les deux dernières catégories n’étant pas toujours très claire. Les enfants entrainés dans la prostitution sont des filles ou des garçons. Les proportions entre les uns et les autres varient d’un pays à l’autre. Certains (surtout les filles)ont été enlevés à des familles rurales et entrainés dans les grands centres touristiques. D’autres sont des "enfants des rues", originaires de familles éclatées par la misère. On voit de plus en plus des enfants de familles non éclatées, qui ne se trouvent pas au-delà du seuil de la pauvreté, et qui ferment les yeux sur les activités de leurs enfants le plus souvent parce qu’ils ne peuvent pas résister au spectacle de la consommation offert par le tourisme de masse.
Aucun enfant ne sort indemne de la prostitution, qui s’accompagne en outre le plus souvent de sévices corporels. Une grande proportion d’entre eux sont séropositifs.
Le problème de la réhabilitation de ces enfants est très complexe et nécessite des moyens diversifiés pour une prise en charge médicale, psychologique, affective et sociale avec, si possible, la réintégration dans la famille et le village d’origine.
L’ECTWT, un organisme international qui travaille sur les conséquences du tourisme de masse dans les pays récepteurs, a été si préoccupé par ce problème qu’il a lancé en 1989 une vaste campagne internationale destinée surtout à informer les pouvoirs publics et l’opinion publique des pays émetteurs de tourisme, sachant que la solution ne pourra pas se trouver seulement dans les pays récepteurs. Lancée sous le nom d’ECPAT (End Child Prostitution in Asia Tourism : mettre fin à la prostitution enfantine par le tourisme dans les pays d’Asie), cette campagne a été largement suivie dans une dizaine de pays d’Europe, et a donné lieu à des initiatives diverses, soit au niveau de la presse, soit au niveau juridique, soit auprès des agences de voyages elles-mêmes et de leur clientèle.
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, Asia
La prostitution enfantine est un thème propre à émouvoir ceux qui en voient les images ou qui en lisent les méfaits dans les médias. Elle semble de plus en plus inhérente au tourisme, au point qu’on peut se demander si le tourisme de masse peut exister sans la sécréter à un moment ou à un autre. Les réponses données, pour positives qu’elles soient (par exemple la poursuite pénale des pédophiles dans leur propre pays, solution juridique qui se généralise dans plusieurs pays d’Europe)semblent encore inefficaces. On peut aussi se demander si ce problème peut véritablement être abordé indépendamment d’une réflexion critique globale sur le tourisme en général, cette réflexion, et la prise de conscience qui en découle devenant nécessaire en amont de toute émotion suscitée par le sort des millions d’enfants concernés.
Report
VALAYER, Dora, INSTITUT DE L'ENFANCE ET DE LA FAMILLE, INSTITUT DE L'ENFANCE ET, 1993/02 (France)