Micro-réalisations économiques et nouvelles sources de revenu

En Europe et en Amérique latine, le CEDAL (Centre d’études du développement en Amérique latine)a engagé une analyse transversale de l’expérience de plusieurs organismes qui luttent contre l’exclusion en encourageant l’initiative économique dans les milieux défavorisés. Ces organismes agissent de différentes façons :

1. en permettant aux porteurs de projets d’accéder à un capital. Plusieurs modalités existent : la prise de participation d’un organisme financier solidaire qui apporte une partie du capital de départ puis revend sa participation au bout de quelques années ; le crédit informel ou alternatif ; l’émission d’une garantie bancaire qui permet à l’emprunteur de trouver des prêts plus facilement ; des prêts en nature (en maïs dans le cas d’une association de soutien aux agriculteurs du Brésil); des subventions de la part d’organismes publics.

2. En encourageant le porteur de projet. Là encore, plusieurs types d’action sont envisageables, souvent liées à son financement : la formation et le suivi ; le parrainage et le tutorat ; l’apprentissage de la (re)socialisation.

De nombreux projets peuvent ainsi être soutenus, qui visent à la fois à créer des emplois et du lien social. En France, 16 expériences font l’objet de fiches annexées à ce document. Il s’agit généralement d’entreprises individuelles, principalement de petits commerces et de services. Les créateurs d’entreprises sont majoritairement des femmes et ont entre 30 et 50 ans. En Amérique latine, 4 expériences sont décrites, toujours collectives : atelier textile, entreprise de jouets, etc.

Au-delà des conditions de succès ou d’échec de ces expériences, liées à des facteurs très divers selon le contexte et le profil de l’entrepreneur, il faut s’interroger sur la portée de telles expériences. Sont-elles de simples bouées de sauvetage pour quelques individus ou préfigurent-elles la construction d’un projet économique et social alternatif ? Deux exemples apportent quelques éclairages sur l’articulation de ces initiatives avec le contexte global.

Au Chili, le FESOL (Foire-rencontre des ateliers de travail et des micro-entreprises de l’économie solidaire)favorise l’échange d’expériences entre des acteurs des "Organisations économiques populaires" (OEP)dont 5300 étaient répertoriées à Santiago en 1992. En organisant chaque année une grande foire où ces entreprises viennent présenter leurs activités et discuter de leurs problèmes, le FESOL contribue à promouvoir ce type d’activité, à mobiliser le grand public et à interpeller les politiques. Son impact sur le contexte national semble encore négligeable, mais le FESOL est un lieu de coordination important qui intéresse les représentants de l’Etat. Le projet de ces petits entrepreneurs était-il de se constituer en interlocuteurs de l’Etat et en acteurs politiques ? Ce n’est pas certain, mais le FESOL constitue bien pour le moment un embryon de lien entre les initiatives micro et l’espace macro économique.

En France, le Réseau de l’économie alternative et solidaire (REAS)est également un lieu d’échange et de concertation entre de multiples initiatives. Il offre à ses membres des services (suivis de projets, montages financiers, etc.), favorise l’échange de savoirs, provoque des réflexions collectives et fait connaître les initiatives économiques citoyennes. Mais en ce qui concerne son intervention dans le débat politique, il sera sans doute nécessaire que soit précisée une fonction de négociation avec les diverses instances concernées.