Méthodologie d’une démarche de développement multidisciplinaire en Equateur
04 / 1996
En 1984, préoccupée par le cloisonnement des disciplines dans les facultés et par le contenu des enseignements universitaires (inspirés principalement de travaux provenant des USA)une petite équipe d’enseignants-chercheurs de la faculté de Médecine de Quito décide d’organiser un séminaire sur la situation alimentaire et nutritionnelle des populations les plus défavorisées du pays. Le but était de réfléchir à une réforme des programmes universitaires qui permettrait une approche véritablement globale des problèmes alimentaires et nutritionnels.
Ils n’ont pas connaissance de références ou d’expériences à partir desquelles ils puissent saisir la réalité des inter-relations entre la nutrition-santé, la consommation-alimentation et la production agricole. Ils décident donc en 1988 de s’engager personnellement dans une expérience de travail de terrain pluridisciplinaire. Ils y associent services publics, participation paysanne et valorisation des ressources locales. Partant du principe que la confrontation des savoirs peut déboucher sur des pratiques satisfaisantes pour tous, qu’elle ne peut se faire sans une certaine qualité de relation humaine, des professionnels de la santé, des agronomes, des ingénieurs d’autres disciplines, des paysans et des instituteurs se mobilisent alors pour créer un réseau engagé dans un processus de transformation durable dont les effets se manifesteront à long terme.
Principaux enseignements :
- le premier impératif d’une approche multidisciplinaire est d’acquérir une vision multidimensionnelle de la réalité de la population, ce qui suppose des compétences et des moyens d’information variés. Pas question cependant pour le professionnel de faire un peu de tout : il doit rester dans sa discipline mais apprendre à communiquer avec les autres professionnels. Cela passe par l’acquisition de concepts communs, la connaissance des présupposés et des méthodes de chaque discipline, etc. C’est ainsi que des actions ciblées pourront être mieux situées dans une perspective globale, donc plus pertinentes. Dans cette perspective, la santé ou la production agricole ne sont plus des objectifs en soi pour le médecin ou l’agronome, mais des indicateurs des conditions de vie et de l’économie paysanne.
- la participation paysanne garantit la pertinence des actions engagées et le dialogue avec les paysans constitue un moyen de diagnostic essentiel pour les professionnels. Il faut à la fois se laisser interpeller par la population et ne pas tomber dans le simplisme qui consisterait à nier ses propres compétences et à lui donner tout pouvoir. Tout doit être discuté dans la transparence, les demandes examinées en commun, les objectifs explicités et acceptés par tous.
- pour garantir la pérennité des processus engagés, le plus important est d’améliorer les capacités de la population à se prendre en charge et à négocier avec le monde extérieur (le marché, les institutions...). Pour cela, il faut mettre en place des actions de formation et la meilleure formation consiste à impliquer les paysans dans des activités de recherche autour de leurs problèmes concrets. Il faut, avec eux, analyser, poser des hypothèses, expérimenter, évaluer...
- les professionnels impliqués dans des projets de ce type doivent bénéficier d’un suivi permanent susceptible de répondre à leurs doutes et d’une formation capable de faire d’eux des gens réceptifs à l’innovation, guidés par un esprit de recherche, considérant la population comme un ensemble de partenaires et non pas de bénéficiaires de leurs services.
- pour durer, une formation de ce type doit s’inscrire dans les programmes universitaires et s’appuyer sur des idées déjà légitimées. Il faut partir de ce qui existe pour y inscrire des changements durables, quitte à progresser plus lentement et à dépenser de l’énergie pour faire bouger de lourdes structures.
Les acteurs du développement peuvent être considérés comme des médiateurs entre la population et les institutions publiques, entre l’action, la recherche et la formation, entre des temps et des univers différents.
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, Ecuador
Book
MASSE RAIMBAULT, Anne Marie, GUIHENEUF, Pierre Yves, Former pour transformer, FPH in. Dossier pour un débat, 1995 (France), n° 49
GEYSER (Groupe d’Etudes et de Services pour l’Economie des Ressources) - Rue Grande, 04870 Saint Michel l’Observatoire, FRANCE - France - www.geyser.asso.fr - geyser (@) geyser.asso.fr