09 / 1996
Pendant la période communiste, les entreprises industrielles ont joué un rôle social très prononcé. Du logement aux loisirs, des soins médicaux à l’éducation, des activités sportives à l’alimentation : l’entreprise était le ferment de la sociabilité dans la société soviétique. L’activité sociale de l’entreprise était alors financée par le fonds d’aide sociale, dont le montant était planifié. Il n’était pas rare que dans les "villes-usines", toutes les infrastructures autant médicales que culturelles d’une localité aient été construites par les salariés et sur le financement de l’unique usine de la ville. Ce système de protection sociale très lié à l’entreprise était justifié par des raisons idéologiques, mais également par la nécessité de limiter la mobilité géographique des ouvriers.
Que peut devenir ce rôle social fondamental alors que les entreprises sont privatisées et que l’économie russe cherche à adopter les lois du marché? La première réforme de grande ampleur menée dans le domaine social a consisté à séparer assurance sociale et aide sociale : l’assurance sociale est désormais financée par un système obligatoire et national de quatre caisses d’assurance (assurance sociale, chômage, pension et assurance médicale)financé par des cotisations que les employeurs payent en fonction de leur masse salariale. L’aide sociale est désormais facultative pour les entreprises.Mais l’attitude des chefs d’entreprises à l’égard de l’aide sociale est très variée : elle dépend en premier lieu de la taille de l’entreprise concernée. On remarque que dans leur grande majorité, les petites et moyennes entreprises dont on encourage le développement dans la période de transformation économique ont un rôle social quasi-insignifiant. De l’aveu même de leurs dirigeants et de celui des responsables d’associations de petits entrepreneurs, leurs moyens financiers ne le leur permettent pas ; mais surtout ce n’est pas leur rôle, c’est désormais celui de l’Etat.
Au contraire dans nombre de grandes entreprises, ayant appartenu à l’Etat, la tradition d’aide sociale procurée aux salariés reste très forte. Mais crise économique oblige, les dirigeants ont été obligés de mettre en avant des priorités dans la politique sociale de l’entreprise. Les parcs de logments ont été cédés aux municipalités. Ce transfert pose de gros problèmes financiers dans les villes et les quartiers très industrialisés où la municipalité doit reprendre en 2 ou 3 ans un parc de logements représentant parfois jusqu’à 60 ou 70% de la totalité des logements de la ville.C’est le cas en particulier dans le quartier Ouralmach de la ville d’Iekaterinbourg : la simple gestion des logements existants est très coûteuse ; c’est pourquoi le programmme de transfert a été étalé sur 5 ans à Iekaterinbourg.
Les infrastructures sociales capables de s’autofinancer ont été le plus souvent privatisées, aux dires des fonctionnaires du Fonds de gestion des Biens de l’oblast’ de Sverdlovsk : cela concerne les magasins d’alimentation, les cinémas, les restaurants.D’autres infrastructures sont louées par les entreprises à de jeunes sociétés commerciales : les anciens hôtels, les foyers d’hébergement sont ainsi devenus la source de revenus réguliers. Les services sociaux le plus couramment conservées dans le giron des grandes entreprise sont ceux qui procurent le plus de bien être et de satisfaction aux salariés : il s’agit des crêches pour la garde des enfants des employés, les maisons de vacances et de repos ou encore des services médicaux rudimentaires. Mais, comme le reconnaissent parfois les comités syndicaux de ces grandes entreprises elles-aussi en voie de transformation, bien que beaucoup moins chers que les services privés,de tels services qui étaient auparavant assurés gratuitement par l’entreprise ne sont pas à portée de toutes les bourses.
social policy, company, state owned company, social protection
, Russia
Le transfert de la protection sociale aux pouvoirs publics est indispensable au passage à l’économie de marché et sanctionne la disparition de la spécificité de l’organisation de la protection sociale en Russie. Cette transformation majeure est vécue diversement par les acteurs du système de santé en Russie : peut-être va t-elle permettre une plus grande égalité entre salariés des petites et grandes entreprises en Russie? Pour l’heure, le système étatique qui a été instauré est en voie de constitution.
Original text
Association France Oural - 14, rue des Tapisseries, 75017 Paris, FRANCE - Tél : +33 (0)1 46 22 55 18 / +33 (0)9 51 33 55 18 - Fax : +33 (0)9 56 33 55 18 - France - www.france-oural.org - franural (@) free.fr