L’ère du Pacifique est-elle arrivée ?

Le centre et la périphérie ne sont pas immuables. Pour l’Europe, avec sa faible mobilité des facteurs c’est plutôt une menace que l’ouverture de nouvelles possibilités. En Asie, il ne faut pas parler de miracle mais d’un processus rationnel de gestion des ressources qui saute sur les opportunités, avec une vision stratégique.

Certes, les sceptiques sont nombreux, mais l’ère du Pacifique n’est pas à venir ; elle est déjà là et c’est bien davantage qu’un changement géographique. C’est le passage d’une logique arisitolicienne et newtonienne au monde de Siddartha Gautama et de Confucius. C’est le passage de l’alphabet roman au monde du signe (idéogramme). La civilisation de l’idéogramme met en lumière une synergie entre développement économique et homogénéité culturelle.

Les valeurs et la culture constituent les soubassements de ce changement. Dans le monde de l’idéogramme, tout est différent, qu’il s’agisse du rôle de l’individu, du gouvernement, du temps, du profit, de l’éducation, de la famille, de la qualité. Pour comprendre cela, il faut de la curiosité et de l’humilité ainsi que la volonté de mettre en cause nos modèles conceptuels. Il ne s’agit plus d’une pensée linéaire mais d’un univers dialectique, cyclique où s’affirme une philosophie de l’unité du corps et de l’esprit. C’est la fin des dichotomies :

- syndicats/management,

- employeurs/employés,

- monde des affaires/gouvernement,

- technologie/chômage,

- qualité/prix, etc...

Il faut que l’Europe désapprenne les oppositions obsolètes entre Est et Ouest, Nord et Sud, pays développés et pays sous-développés, car elles sont inappropriées pour évaluer et définir les problèmes de l’interdépendance globale et de la multipolarité. Il faut se convaincre que le développement n’implique pas occidentalisation même s’il lui emprunte quelques vêtements. Il ne faudrait pas s’abriter derrière une théorie de la convergence comme derrière un alibi inventé par l’Occident pour se rassurer quant à sa suprématie culturelle.

Le souci de la "sécurité d’abord" ainsi qu’une attitude insultante par rapport aux nouveaux venus ont miné la vigueur de l’Occident.