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dialogues, proposals, stories for global citizenship

Défis sur tous les fronts pour les ONG d’Amérique latine

Bernard OZANAM

07 / 1997

Confrontées a une situation socio-politique en pleine mutation, les ONG d’Amérique latine voient se modifier leur approche de l’action, ainsi que la nature du dialogue avec les organisations populaires et enfin leurs rapports avec les ONG du Nord et les bailleurs de fonds.

Dans les années soixante dix, alors que syndicats et partis politiques étaient baillonnés par les dictatures, les ONG naissantes représentaient le seul canal d’expression possible. Elles conçoivent leur action en opposition aux gouvernements en place en se consacrant à la défense des plus pauvres.

Aujourd’hui, le contexte est différent. La démocratie s’étend peu à peu et d’opposantes les ONG en sont venues à participer à la politique, après une période de méfiance des nouveaux régimes à leur égard.

Les ONG se multiplient à tel point qu’elles se concurrencent, chacune cherchant à s’assurer une reconnaissance de la part du peuple. De même, elles veulent s’assurer le contrôle des fonds alloués au développement.

Mais quel rôle jouent aujourd’hui les ONG en Amérique latine ? Et quelle reflexion nourrit leur action ?

Longtemps leur action s’est nourrie de problématiques de développement inspirées par des hommes de gauche. Aujourd’hui, ces mêmes problématiques s’inspirent de concepts neo-libeéaux, ce qui a pour conséquence de désorienter les ONG latino-américaines, plutôt à gauche.

Celles-ci se sont repositionnées sur d’autres terrains que celui de l’économie, à savoir l’écologie, les minorités culturelles et la réflexion sur le problème de la dette. Elles ne réussissent pas, cependant, à exprimer des propositions de remplacement, ce qui pourtant est la condition d’un vrai débat. Elles veulent compenser ce relatif effacement sur le terrain idéologique par un rôle accru dans le domaine socio-politique.

Cet engagement redoublé se fait à deux niveaux. Tout d’abord, celui des hommes : nombreux sont les cadres des ONG qui sont devenus des acteurs politiques. Ensuite, les ONG sont partie-prenante dans l’organisation de plate-formes de discussion. Elle veulent promouvoir le dialogue entre les différents acteurs de la vie sociale, économique et politique. Elles ont ainsi été reconnues par l’Etat comme des partenaires incontournables, ce qui leur a permis d’avoir accès au FIS (Fonds d’investissement Social)en Amérique centrale, c’est-à-dire d’avoir la possibilité de mettre sur pied de nouvelles expériences.

Neanmoins, ces aspects positifs sont contrebalancés par le risque pour les ONG d’être utilisées par l’Etat pour contrôler la société et de perdre ainsi leur identité.

Mais les ONG ne sont pas les seuls acteurs de la vie socio-politique. Des hommes et des femmes issus du peuple ont voulu prendre leur destin en mains : des organisatons populaires se sont formées.

Peu à peu, ces organisations ont gagné en importance et en maturité. Aujourd’hui, elles cherchent à s’emanciper par rapport aux ONG. Elles reprochent aux organisations non gouvernementales de chercher à imposer leur point de vue, mais aussi de tenter de les maintenir sous influence, pour perdurer. Encore plus grave, les organisations populaires souhaiteraient pouvoir gérer "les fonds externes" reçus par les ONG. Il y a donc une rivalité entre "des protagonistes (qui)devraient faire partie d’une alliance, chacun ayant un rôle distinct, mais sans compétition et sans être subordonnés les uns aux autres" (Cacade, Costa Rica).

Les ONG d’Amérique latine ne pourraient-elles pas s’inspirer de leurs consoeurs africaines ? Celles-ci sont l’émanation directe du monde rural. Dans un contexte socio-politique semblable à celui de l’Amérique latine, elles ne se sont pas voulues opposantes et se sont consacrées aux réalisations économiques exclusivement - ce qui les différencie des ONG latino-américaines.

Il n’y a donc pas de problème entre les ONG africaines et leur base. Ceux-ci se rencontreraient plutôt avec les ONG du Nord. La divergence vient du rôle que ces dernières doivent jouer. Pour les ONG africaines, leurs consoeurs du Nord doivent avant tout informer leur opinion publique et faire du lobbuying auprès des gouvernements. Les ONG du Nord, elles, pensent avoir un rôle à jouer sur le terrain. Elles ne reconnaissent pas les compétences de leurs collègues africaines.

On retrouve les mêmes difficultés entre les ONG d’Amérique du Sud et les ONG du Nord. Ces dernières n’ont pas pris la mesure des transformations qui ont affecté les ONG latino-américaines. Ces dernières ont maintenant des cadres compétents et au professionnalisme avéré. Elles n’ont plus de besoins dans ce domaine précis.

Par contre, elles ont besoin de fonds, et aussi que l’on reconnaisse l’importance de leur action socio-politique.

Face à ces attentes, les ONG du Nord ne formulent pas les réponses attendues. Elles insistent sur la rentabilité des projets, tout en n’étant pas à même de mettre en place des instruments d’évaluation (rapport, audit...)des projets. Elles doivent faire face aussi au désir réciproque des organismes internationaux et des ONG latino-américaines de traiter directement, en se passant des intermédiaires traditionnels.

Contestées, les ONG d’Amérique latine et celles du Nord doivent trouver un nouveau positionnement sous peine de marginalisation.

Key words

NGO, State and civil society, association


, Latin America

Source

Articles and files

GUENEAU, Marie Christine, Les ONG françaises et l'Amérique latine : nouveaux discours, nouvelles pratiques, CEDAL FRANCE in. COMUNICANDO (France), 20, spécial 1492-1992, vol.1

CEDAL FRANCE (Centre d’Etude du Développement en Amérique Latine) - France - cedal (@) globenet.org

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