L’accès aux ressources génétiques végétales / un enjeu de développement
10 / 1995
La perte de biodiversité est un phénomène qui s’est accélérée depuis deux siècles avec l’apparition de l’agriculture industrielle, l’extension des villes et le fort développement démographique entraînant des besoins croissants. Un quart de la diversité biologique risque de disparaître d’ici l’an 2020 . Or, historiquement, l’homme a été générateur de biodiversité par les sélections de plantes et d’animaux et par ses migrations. Les sélections, autrefois empiriques sont maintenant "scientifiques" afin de répondre aux demandes immédiates. Elles se traduisent par de l’hyperspécialisation et entraînent la mise en place d’entreprises spécialisées de production de semences et de races améliorées. La diffusion de ces variétés fait l’objet d’un commerce sans aucune mesure avec celui des siècles passés et génère des règles spécifiques, objets de négociations locales, nationales et internationales.
La biodiversité, et plus spécifiquement l’accès aux ressources génétiques (c’est à dire le matériel prélevé à la biodiversité pour être utilisé à des fins agricoles, industrielles, médicinales, etc...), devient un enjeu du développement. On cherche à conserver, protéger ou partager. De nombreuses considérations économiques voire stratégiques viennent influencer le choix d’un libre accès ou au contraire d’appropriation privée. Globalement, les pays détenteurs de biodiversité, souvent pays du Sud, cherchent à valoriser financièrement cette richesse; mais ils se trouvent devant le danger de se voir privés de pouvoirs par les pays pauvres en ressources génétiques, mais puissants par leurs multinationales ou leurs centres de recherche.
En fait, la politique en matière de ressources génétiques de chaque pays diffère selon leur stratégie, leurs ressources et leurs besoins.
Les dirigeants du Brésil, un des centres mondiaux de "mégadiversité", sont déroutés par la complexité des enjeux essentiels pour l’avenir; ils n’ont pu qu’adopter une position de principe sur la nécessité d’un contrôle exercé par les pays détendeurs d’importantes ressources génétiques et négocier l’accès à l’information et à la technologie; cette position fait l’objet de vives critiques de la part des O.N.G. brésiliennes qui considèrent que le gouvernement, en poursuivant des objectifs purement politiques et financiers, fait l’impasse sur les programmes de développement durable du point de vue de l’environnement.
A l’opposé, l’Inde, autre pays de "mégadiversité", qui a réussi à se prémunir des risques de famine par son utilisation effective , récuse toute forme de brevet et dénonce les articles du GATT concernant la propriété intellectuelle car ils menacent l’indépendance de son agriculture et de sa recherche agricole.
Les instances internationales se trouvent de plus en plus en porte à faux et les contradictions sont nombreuses au sein de la FAO, du GATT et des CIRA (Centres Internationaux de Recherche Agricole, au nombre de 18, qui ont réaffirmé en 1992 le principe du libre accès à leur collection). Le consensus est loin d’être atteint, les conventions, en particulier celle sur la biodiversité signée par plus de 150 pays, ne peuvent rentrer en application car elles restent non ratifiées (17 parlements nationaux ont ratifié la convention sur la biodiversité alors qu’il en faudrait 35).
Certaines pistes de réflexion et propositions semblent surgir et faire toutefois l’objet d’un consensus global
- faire disparaître la politique de conservation caricaturée par une formule simple : "Pour conserver le jardin d’Eden, chassons Adam et Eve". Au contraire, non seulement la préservation du jardin devient compatible avec la survie des hommes, mais l’agriculture paysanne apparait comme un bon instrument de conservation des ressources génétiques;
- appuyer la démocratisation des processus de décision et en particulier favoriser l’émergence à l’échelon local de lieux de négociation;
- privilégier un système de régulation internationale, encourager l’instauration de règles de conduite et favoriser des transferts technologiques et financiers.
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, , France
Biodiversité : le vivant en mouvement
Un dossier quelque peu ardu pour les non-initiés. On comprend cependant pourquoi la biodiversité est un enjeu majeur pour les générations à venir et on perçoit bien la complexité des intérêts en présence.
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ARNAUD, D., ILBERT, Hélène, MONGRUEL, Rémi, Solagral, La biodiversité, le fruit convoité, FPH in. Dossier pour un Débat, 1994 (France), N°30
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