Des éclats de rire et des bruits de voix amènent tout droit au local de "L’Étape" à Bron Terraillon. L’accueil est vivant et sympathique. Partie d’une demande de la municipalité qui souhaitait créer un lieu d’accueil en lien avec le Secours catholique, pour aider et accompagner des personnes en difficulté dans leurs démarches (administratives, recherche d’emploi ...), "L’Étape" est certains jours une ruche où des abeilles consciencieuses s’appliquent à peindre sur des supports très divers (fer, bois, verre), à réaliser des objets en pâte à sel, entre autres.
Derrière les premières demandes autour de l’emploi, les animatrices du centre social du quartier et du Secours catholique entendaient aussi "je m’ennuie, je déprime, j’ai des problèmes de santé". Elles ont voulu prendre en compte ce qui leur était ainsi exprimé. Ainsi sont nés des temps de rencontre et de discussions, des sorties familiales, des activités manuelles ...
"J’étais dépressive, j’ai douze enfants mais ils sont grands, je me retrouvais toute seule, et tout l’après midi devant une télé. J’avais aucun contact avec les voisins, je ne sortais pratiquement pas. J’ai rencontré Marie-Thé qui m’a dit : "Il faut venir à "L’Étape", mais je n’osais pas, j’étais un peu timide. Un jour, Chantal m’a téléphoné : "Louise, il faut venir à 14 heures, on t’attend". Je suis venue et plus repartie. C’est un lieu familial, j’ai trouvé des amis. L’amitié c’est beaucoup".
Les personnes arrivent à "L’Étape" sur invitation d’un(e)voisin(e), d’un(e)ami(e)ou par le biais d’une assistante sociale qui, grâce à un partenariat de plus en plus étroit avec "L’Étape", accompagnent le plus souvent les personnes pour la première rencontre avec une des animatrices.
L’Étape se veut donc un lieu où reprendre souffle, confiance en soi, s’apprivoiser, rencontrer d’autres personnes, recréer des liens. On respecte la trajectoire de chacun. Afin de ne pas créer un "ghetto", et de ne pas enfermer l’Étape dans l’image d’un lieu d’accueil pour les personnes en difficulté, les animatrices comptent beaucoup sur l’ouverture au quartier et le partenariat avec d’autres structures.
Ainsi, l’Étape organise des soirées festives à thèmes (contes, crêpes et jeux,...)qui sont ouvertes à tous sur invitation préparée et envoyée aux "officiels" et aux familles des participants. L’Étape collabore aussi aux festivités organisées par la ville (carnaval de Bron, la Fête du Livre).
Deux fois par an, les journées portes ouvertes permettent de faire connaître l’Étape, de faire de nouvelles rencontres tout en vendant les différentes réalisations du groupe (objets divers, confitures ...). "C’est important de vendre ce qu’on fait, et ça nous fait un peu d’argent pour nos vacances". Vis-à-vis des financeurs, c’est aussi le signe que l’Étape cherche à gagner une certaine autonomie pour la réalisation de ses projets.
L’an dernier, dix-sept personnes sont ainsi parties avec les deux animatrices pour une semaine de vacances. Cela a permis à chacun de participer à l’organisation du séjour et de se découvrir mutuellement dans un tout autre cadre.
Les animatrices veillent à avoir une compétence technique pour la qualité des réalisations des ateliers. Mais le relationnel est aussi important pour l’accueil et l’accompagnement des personnes. "On s’est aperçu qu’au départ on n’était pas formé pour l’écoute, les personnes nous confiaient des choses, il fallait pouvoir prendre du recul, on ne pouvait pas faire n’importe quoi". Aujourd’hui, un groupe de travail animé par un psychologue rassemble tous les quinze jours les assistantes sociales du CCAS et les animatrices des deux lieux d’accueil sur Bron ("Le Tremplin" et <l’Étape>). "Le travail se fait par rapport à des situations rencontrées en essayant de comprendre ses propres réactions et celles des personnes accueillies. Il y a des tas de choses qui ont évolué. On comprend des situations qui paraissaient très compliquées et où l’on paniquait". Cela permet aussi de décloisonner le travail engagé par différentes structures auprès des mêmes publics.
Les relations avec les bénévoles du Secours catholique (mère de famille, ancien militaire, comptable retraité...)apportent une grande richesse avec une mise en commun d’expériences très diverses et oblige à une ouverture d’esprit qui empêche de se scléroser. C’est pour les professionnelles une remise en question permanente. Depuis janvier 1996, des réunions d’équipe mensuelles avec les bénévoles et une responsable du Secours catholique ont été instaurées afin de mieux les intégrer dans les décisions et les réflexions de fond.
On apprend aussi la tolérance, le respect de l’autre, à mieux connaître et à accepter les autres. "Parfois, on est là en petit groupe. Une nouvelle personne arrive et on se dit : pourvu qu’elle reste pas. Mais on arrive à se connaître. Maintenant, on est moins méfiantes, on se dit que la personne a peut-être les mêmes problèmes que nous". Petit à petit, il s’agit aussi de comprendre que si l’on ne respecte pas les autres, on ne peut pas être respecté, que lorsqu’on prend un engagement, il faut le tenir. Le groupe a besoin de règles pour fonctionner.
De leur côté, les animatrices apprennent aussi à prendre le temps pour ne pas tomber dans l’activisme et respecter le rythme du collectif et de chacun. Pour elles, il est important de savoir exprimer les limites de leur disponibilité sans donner l’impression de refuser l’échange demandé : "aujourd’hui, je n’ai que dix minutes, je ne peux pas parler avec toi, mais je prends une demi heure avec toi plus tard si tu le veux".
Leur rôle est également de permettre aux personnes de prendre des responsabilités, chacune selon ses capacités afin de ne pas les mettre en échec, et de savoir se mettre en retrait. Exemple : Louise a participé à la conférence de presse pour la journée nationale du Secours catholique, des femmes vont représenter l’Étape dans les réunions du collectif des associations etc. Les animatrices reconnaissent que les femmes de l’Étape7 (peu d’hommes restent)leur donnent des "sacrées leçons de vie".
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Les idées pour de nouvelles activités, de nouvelles sorties, de nouvelles ouvertures sur l’extérieur fourmillent. Mais aujourd’hui, les personnes qui ont le plus de difficultés à suivre cette évolution ne restent pas à l’Étape. Toutefois, les idées ne manquent pas et les animatrices parlent de "parrainage", de meilleur accompagnement de ces personnes en se rendant au domicile de certains... elles gardent en permanence le souci de rendre partie prenantes les femmes dans tous les projets : "On ne peut rien faire les uns sans les autres".
* Marie-Thé Marqué est animatrice au centre social Gérard Philippe et à l’Étape tél. 04 72 14 97 60
Contacts : Chantal Randani, Coordinatrice de l’Étapetél. 04 72 14 97 60 et des personnes de l’Étape; CCAS=Centre communal d’action sociale, Maison du département du Rhône - MDR -
Texte mis en fiche et diffusé par le CR-DSU=CENTRE DE RESSOURCES SUR LE DEVELOPPEMENT SOCIAL URBAIN, 4 rue de Narvik, BP 8054, 69351 Lyon cedex 08, FRANCE. Tel 78 77 01 43. Fax 78 77 51 79
Entretien avec MARQUÉ, Marie Thé; PHILIPPE, Gérard
Internal document ; Interview
MRIE RHONE ALPES=Mission régionale d'information sur l'exclusion, Agir avec les plus défavorisés, MRIE RHONE ALPES, 1996 (France)
MRIE RHONE ALPES (Mission Régionale d'Information sur l'Exclusion) - 14 rue Passet, 69007 Lyon, FRANCE - Tél. 33 (0)4 37 65 01 93 - Fax 33 (0)4 37 65 01 94 - France - www.mrie.org - mrie (@) mrie.org