Le petit bois des forêts, mais aussi celui des jardins et des rebuts ainsi que des déchets industriels constituent une source d’énergie renouvelable sous-utilisée dans les autres pays occidentaux. Il est vrai qu’à beaucoup d’endroits se mettent en place des "plans bois." Le pays de loin le plus avancé en ce domaine est L’Autriche. Avec 200 réseaux de chaleur et 13 000 chaufferies installées, la filière y représente aujourd’hui une puissance de 1.500 MW.
Comment expliquer le succès de cette option pourtant toujours plus chère que les chaufferies fonctionnant aux hydrocarbures ou au gaz ? Selon Laurent Chanussot du Comité de Liaison Energies Renouvelables à Grenoble "la filière bois énergie autrichienne constitue un double succès technique et environnemental, mais également une réussite économique puisque les projets ont une viabilité acceptable malgré une conjoncture très défavorable." La réussite est liée à un partenariat étroit entre l’Etat, les acteurs régionaux chargés de l’animation sur le terrainles centres techniques et les professionnels. Le BMLF (Ministère Fédéral de l’Agriculture et des Forêts)subventionna 49 projets en 1987, 302 en 1991 et 2.157 en 1993. Et la tendance se confirme, bien que chacun sache que malgré les subventions et les crédits à des conditions avantageuses, l’investissement revient toujours cher aux communes, à cause des temps de retour longs (15 ans pour les équipements techniques, 30 ans pour le génie civil et la voirie). De nombreux Autrichiens placent de l’argent dans les multiples petites sociétés de capitaux qui gèrent les réseaux de chaleur : des sociétés coopératives, des sociétés en nom collectif, des Sarl et des sociétés en commandite simple.
Wolfgang Jilek, responsable de la politique énergétique dans la Styrie affirme que les investisseurs ont très bien pesé les pour et les contre avant d’engager les capitaux : "La rentabilité financière à court terme n’est pas le seul critère, affirme-t-il. Les gens sont prêts à payer plus cher s’ils comprennent que cela a un sens. Ils ont envie de faire quelque chose pour l’économie autrichienne et pour l’environnement."
Aux yeux des Autrichiens, les réseaux de chaleur représentent un progrès, dans le domaine du confort d’utilisation et de l’amélioriation des technologies de combustion. Et c’est un progrès qui crée ou qui maintient des emplois - pour la fourniture du combustible, pour le génie civil/voirie, pour la conduite des chaufferies... Les subventions de l’Etat et des Régions sont d’ailleurs soumises à la condition de s’approvisionner pour au moins 75% auprès des agriculteurs et des forestiers locaux.
Wolfgang Jilek souligne aussi que le facteur probablement le plus important est la prise de conscience récente concernant la qualité des ressources énergétiques naturelles. Les Autrichiens qui sont attachés à leurs forêts savent que l’exploitation des petits bois est une manière de les entretenir. "Je peux affirmer aux gens que leur commune tire absolument profit d’une centrale aux biomasses. Evidemment, il faut que je le prouve, et cela demande du temps et d’excellentes bases d’information. Nous disposons par exemple de mesures précises qui montrent que la qualité de l’air s’améliore beaucoup si l’on remplace des installations classiques de chauffage par des réseaux de chaleur proche. Les 20 premières centrales nous ont coûté un investissement énorme en temps et en effort de communication."
En 1980, il n’y avait aucun réseau de chaleur au bois en Styrie, en 1985 il y en avait trois, en 1990 une quarantaine et aujourd’hui 80. La plupart ont une puissance comprise entre en 1 et 5 MW. Le réseau bois de la ville de Harbeck est le plus important, avec une puissance de 18 MW.
Les programmes "énergie verte" sont basés sur des bilans énergétiques et des bilans des émissions atmosphériques mis au point à intervalles réguliers. La Styrie a initié de nombreux projets de recherche pour étudier tous les facteurs qui doivent entrer en jeu quand il s’agit de décider sur un investissement à long terme. Avant de construire par exemple le réseau à biomasse de Kalwang, une étude minutieuse avait comparé l’alternative des installations individuelles au gaz naturel ; la conclusion fut que le projet biomasse était avantageux, malgré les coûts élevés du départ. Le réseau bois de Hartberg, avec 18 MW -la plus grande installation en Autriche-, a été créé par la compagnie pétrolière de Shell, malgré la concurrence de la compagnie gazière régionale.
Même si les projets de taille moins importante ont une viabilité économique plus difficile, ils s’avèrent rentables dans un sens qui signifie plus que l’amortissement à courte vue.
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, Austria
Entretien avec JILEK, Wolfgang; CHANUSSOT, Laurent
Articles and files ; Interview
Une enquête détaillée sur les "programmes bois" en France se trouve dans : <Systèmes Solaires>N°107, p.5-26, <Fondation Energies pour le Monde>146 rue de l'Université 75007 Paris. Tel 1 44 18 00 80. Fax 1 44 18 00 36