02 / 1996
Nicole Posamentiroff a été pendant plus de dix ans chargée de mission pour la formation maritime au sein du Ministère de la Coopération. Maintenant retraitée, elle est consultante bénévole au Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD)pour le "programme Mer".
- La formation des agents chargés de la réalisation et du suivi des projets. Jusqu’à ces dernières années, les agents en charge des projets de développement étaient pour la plupart des gens de métier ayant une expérience africaine et de terrain poussée : médecins, agronomes, professeurs, psychologues...Actuellement, il me semble que ce type de spécialistes subsiste dans certains secteurs, mais qu’il y a beaucoup plus d’agents issus des grandes écoles de l’administration (dont l’ENA). C’est par des stages et des affectations à l’étranger qu’ils acquièrent une connaissance des problèmes africains. Je note donc une tendance à la fonctionnarisation et au "généralisme". Par ailleurs, la réalisation proprement dite des opérations sur le terrain est toujours confiée à des bureaux d’études et à des experts sous le contrôle des responsables de projets (à Paris et dans les missions de coopération à l’étranger).
- La nécessité de travailler avec les ONG? Il y avait beaucoup de gens dans ce Ministère qui étaient convaincus de la nécessité de travailler avec les ONG. Il y a eu une poussée de la base qui a fini par convaincre. J’ai connu un service des ONG avec deux personnes seulement. Maintenant, c’est un département entier de grande importance situé dans une sous-direction commune, celle du Développement : C’est la Sous-direction du Développement Institutionnel (DEVI)dont l’orientation actuelle est de travailler avec les sociétés civiles. Cela signifie que l’on fera du développement réussi si l’on s’appuie sur ces sociétés et les hommes qui la composent. Les volontaires des ONG, agissant sur le terrain, à l’écoute des hommes, ont certainement permis de mieux comprendre le développement.
- L’intérêt pour la coopération maritime? Les Ministres et leurs Cabinets qui se sont succédés à l’époque de mon activité au Ministère, ne mettaient pas je pense en priorité la coopération maritime, pris par d’autres urgences d’aide au développement des pays en voie de développement (PVD)telles que la santé, le développement rural, la mise en place des moyens de production, des systèmes éducatifs, etc...Cependant, durant cette période (1980-1990), plusieurs personnes étaient chargées de fonction touchant le développement des activités maritimes pour les pays de la compétence du Ministère (ports et services, développement et mise en valeur des ressources vivantes, formation maritime). La reconnaissance de la zone économique exclusive et ses conséquences économiques sur les pays du Nord et du Sud jouaient certainement en faveur de ces fonctions. De plus, les conseillers et assistants techniques avaient des fonctions similaires sur le terrain. Le Ministère chargé de la Mer assurait de son côté la coordination des actions menées et des demandes de leurs partenaires maritimes. Leurs représentants siégeaient à ma connaissance au Comité Directeur des Fonds d’aide et de coopération et des commissions ad hoc permettaient le suivi des opérations.
Les relations directes et permanentes existaient entre les chargés de mission des deux Ministères, soit pour le suivi des projets, soit pour les recrutements des assistants techniques. Ajoutons que l’ORSTOM, organisme de recherche bien implanté en Afrique, menait des recherches sur la ressource et la gestion des stocks. Malgré tout cela, il est significatif de ne pas trouver dans les organigrammes du Département, de bureau spécifiquement chargé de la Mer (tel que l’on peut en trouver par exemple au CCFD!). La pêche est souvent rattachée au développement rural sous la responsabilité d’un ingénieur agronome dont la spécialité n’est pas forcément halieutique! Aujourd’hui, autant que je puisse en juger, je constate que deux postes sur trois n’ont pas été réoccupés mais, qu’en revanche, le secteur de la pêche et des ressources vivantes aura un nouveau responsable sous peu (août 95). Ceci représente à coup sûr une prise de conscience des enjeux et du poids économique de la pêche artisanale et industrielle dans les pays du Sud.
- La promotion des idées. "Au sein de toutes les structures, on trouvera toujours des individus qui vont essayer, en restant dans la ligne générale qui est fixée, de faire passer des idées. Cela m’a beaucoup frappée quand j’ai travaillé au Ministère de la Coopération. Parmi les demandes de financements de projets qui arrivent dans un Ministère, les différents chargés de mission vont proposer à leur direction les projets qui leur semblent les plus intéressants, les plus porteurs et vont, à travers ce choix, laisser leur marque. J’ai été frappée aussi par la mise en commun des forces de travail.
D’une façon générale, on ne travaille pas seul mais en équipe technique souvent volontairement constituée. J’étais entourée de conseillers à l’intérieur et à l’extérieur du Ministère qui faisaient eux-mêmes ce qu’ils pouvaient pour aider le développement des activités et des sociétés maritimes."
fishing, sea, cooperation, State and civil society, cooperation policy
, France
"- Il faut à l’agent de développement une certaine passion de son travail et une aptitude à le réaliser avec d’autres.
- Etre à l’écoute des partenaires est essentiel et une relation permanente doit s’établir entre ceux qui demandent une aide pour se développer, ceux qui financent, ceux qui réalisent.
- Un projet ne réussit que si les hommes qui l’ont demandé en font leur affaire."
Entretien réalisé par Sophie Nick à Paris, au CCFD, dans le cadre de la capitalisation d’expérience du CEASM. Nicole Posamentiroff a travaillé avec le CEASM lors de la conception d’un ouvrage sur "la Coopération et la Mer".
Adresse : CCFD, 4 rue Jacques Lantier, 75001 Paris.
Entretien avec POSAMENTIROFF, Nicole
Interview
CEASM (Association pour le Développement des Activités Maritimes) - Le CEASM a arrêté ses activités en 2001. - France