La constitution d’un réseau régional visant à valoriser les produits de la mer en Afrique de l’Ouest

Pierre Herry est depuis plus de vingt ans secrétaire général du CEASM. Il travaille notamment au développement d’un programme régional pour la valorisation des produits de la pêche artisanale à l’échelle de seize pays d’Afrique de l’Ouest. Il évoque ici quelques difficultés rencontrées lors des séminaires qui ont aidé à la préparation du programme.

"Quand on réunissait des cadres de l’administration africaine au cours de séminaires régionaux, leur préoccupation est souvent de savoir ce qu’ils vont pouvoir récupérer pour leur Etat ou pour eux-mêmes. Ils sont généralement très préoccupés par leur "per diem", par l’aide qu’ils vont pouvoir obtenir de la part de la CEE, de la Coopération française ou par un poste éventuel de cadre dans un projet de développement. Ces difficultés peuvent être des causes d’échec et casser le départ des projets de développement. Il y a des pressions très fortes quand des fonctionnaires développent entre eux une stratégie d’accaparement en ayant pour priorité ce qu’ils vont gagner pour leur administration parce que ça les sécurise et ça maintient leur pouvoir d’encadreur. Dans le cas du programme régional, la préparation a toujours été organisée conjointement avec une coordination africaine ; lorsque nous étions confrontés à des problèmes, c’est elle qui arbitrait. Cela n’empêche pas que nous avons eu à gérer ce genre de conflit et notamment lors d’un séminaire à Dakar en 1984 où nous avons failli tout arrêter au bout du deuxième jour. En écoutant les doléances de chacun, nous sommes toujours restés sur une réflexion de fond ; je pense que cela a donné une crédibilité à l’ensemble. Nous n’avons jamais cédé à de quelconques largesses, nous avons eu une rectitude sans faille, une transparence constante au niveau des comptes. Tout le monde pouvait voir Jacky (chargée de gestion du CEASM)avec ses cahiers sur la table. C’est une manière d’imposer notre façon de travailler. Quels que soient les cadres qui ont participé à ces séminaires, je crois qu’ils nous sont reconnaissants d’avoir maintenu ce cap en permanence. Le résultat est, qu’aujourd’hui, il y a une ossature, un réseau de travail relativement solide car nous avons renvoyé toutes les questions aux problèmes de fond pour positiver les préoccupations par trop personnelles ou nationales et montrer que l’enjeu est celui d’une coopération régionale de compétences, de savoir-faire pour inventer, implanter en Afrique de l’Ouest une politique économique qui puisse satisfaire durablement les besoins alimentaires de la région."