01 / 1994
Les Colombiens eux-mêmes n’ont vraiment découvert ce mouvement qu’à la fin 1990, lorsque les élections à l’Assemblée Constituante révélèrent un élu hors catégories mais appuyé par un vote important: Lorenzo Muelas, indien de Guambía, qui s’était présenté au nom des Autorités Indigènes de Colombie (AICO).
AICO était la récente projection nationale de AISO, le mouvement des Autorités Indigènes du Sud-Ouest qui depuis le début des années 70 oeuvrait dans le Cauca et les zones voisines à la restauration des territoires et identités indigènes et à leur développement autonome.
Mais AISO était méconnu alors que, à côté, d’autres organisations, indigénistes et revendicatives, avaient pignon sur rue dans les confréries nationale et internationale. Pourquoi? Parce qu’AISO dérangeait.
A l’heure où les idéologies radicales cherchaient à englober les minorités ethniques en les réduisant à la case "exploités", AISO s’efforçait de retrouver les mille facettes et d’explorer les mille voies de la vie de "peuples".
A l’heure où la lutte pour la survie et contre l’exclusion se portait plutôt vers les formules armées, AISO refusait aussi bien la logique de guerre que la compromission avec les trafics de drogue, tout en multipliant les actions concrètes.
A l’heure où les stratégies revendicatives préféraient l’incommunication avec toutes sortes d’autorités nationales couplée à l’insertion dans les grands réseaux de solidarités internationales par appartenance idéologique, AISO priorisait la rencontre avec les arts et les savoirs de la tradition indigène tout en essayant de multiples contacts et relations avec les représentants et les structures de la société colombienne.
Ainsi, au début des années 80, un président de la République fut invité sur le terrain indigène à débattre avec les peuples indiens. Il vint et la rencontre fut publique et solennelle, d’égal à égal.
Ainsi, au milieu des années 80, le mouvement commença par présenter des candidats autonomes aux élections locales et y acquit espace et expérience pour une action postérieure au plan national.
Le parcours d’AISO est extrêmement atypique. Il a refusé toutes les modes, leurs projets financés de l’extérieur, leurs alliances envahissantes, il s’est défendu des conseilleurs - quêteurs de clientèles. En même temps il est entré à tous les partages féconds, avec des professionnels solidaires, avec d’autres groupes indigènes ou populaires, en Colombie et dans les pays voisins. En agriculture, en santé, en éducation, en défense des droits, des traditions, des savoirs, en recherche des améliorations possibles.
L’histoire du mouvement des Autorités Indigènes du Sud-Ouest de Colombie est d’une richesse extrême en expériences et en acquis sur quantité de sujets qui préoccupent aujourd’hui nos sociétés en crise.
Sur la construction de la paix par exemple, car il a fallu apprendre pour vivre et agir sur le terrain de chasse des guérillas, des armées, des grands propriétaires terriens et des trafiquants de drogues.
Sur le développement autonome, aussi bien dans la stratégie que dans la méthode, car la pratique alliait le retour aux sources pour les revaloriser et l’ouverture sur les apports extérieurs, obligeait à préciser des critères et des techniques de travail.
Sur les relations entre le micro et le macro car l’apparent isolement des débuts n’était en fait qu’une préparation et non une négation, car c’est dans la richesse des années locales que s’est forgée la vision nationale, que s’est construite l’actuelle capacité de proposition et d’action.
Sur bien d’autres thèmes encore: la démocratie, l’économie, etc.
autonomy, autonomous development, ideology, cultural interdependence, justice, ethnic minority, culture and development, culture and technique, micro macro relations, traditional knowledge, experience enhancement, construction of peace, negotiation, ethnic claim
, Colombia, Cauca
La méconnaissance du mouvement AISO était normale autrefois car il était trop à contre-courant, il dérangeait. Aujourd’hui elle est moins justifiable. AISO est, sur bien des points, un interlocuteur, un organisme-ressource qui offre une longue expérience dans une démarche à laquelle nous accédons maintenant, pour beaucoup, en termes de "reconversion".
Bien sûr il dérange encore car c’est toujours depuis la base et depuis l’action qu’il construit ses relations et ses propositions, qu’il élabore le partage, ce qui implique d’autres rythmes, d’autres manières, d’autres langages. Mais il pourrait être un partenaire de choix pour bien des entreprises et bien des recherches.
L’adresse de AISO=Autoridades Indígenas del Sur Occidentalest: Carrera 2 N°11-21 - Silvia - Cauca - Colombie. Egalement: AISO - Apartado Aéreo 11328 - Cali - Colombie - Tél.: (57)2 - 883 86 39 - Fax: (57)2 - 881 24 41.
Organisation presentation ; Original text