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Création d’une activité de microédition

Les atouts pour réussir

Christine AULAGNER

03 / 1995

En septembre 1995 Samir K. a créé son entreprise de publication assistée par ordinateur. Vingt-six ans, il habite dans un quartier populaire où il souhaitait créer son activité. Son parcours va à l’encontre d’un certain fatalisme concernant les "jeunes des quartiers".

Orienté dès la cinquième, par l’école et par sa famille (d’origine tunisienne), vers une scolarité courte, il passe deux CAP de mécanique générale. Peu attiré par ces métiers, il n’a jamais travaillé dans ce secteur. C’est le travail dans une épicerie qui lui donne "le goût du commerce"... Après avoir acquis un minimum de sens commercial, il cherche à le développer dans d’autres domaines en particulier dans la vente d’espaces publicitaires pour un magazine. C’est là qu’il découvre la publication assistée par ordinateur (PAO), et qu’il a l’envie et l’idée d’en savoir plus.

Il travaille en même temps en indépendant pour un imprimeur et s’équipe petit à petit de matériel informatique. Il se "forme sur le tas", passe des heures à répondre à une commande quand un professionnel y passerait quelques minutes. à la recherche des réponses, il acquiert un savoir-faire qu’il sait utile pour la suite. C’est un temps de maturation de son projet de création d’entreprise, de confirmation de ses compétences techniques. Il a pu aussi mettre de l’argent de côté pour investir dans le matériel indispensable. En six mois il devient efficace et cherche comment passer à un statut officiel.

DES PERSONNES RESSOURCE POUR CONFORTER ET METTRE EN OEUVRE SON PROJET

Avec cette idée en tête, il rencontre le Centre d’action économique (CAE)qui veut aider au développement économique et faciliter l’embauche des demandeurs d’emploi du secteur : "c’est "action économique" qui m’a attiré et je suis entré". Celui-ci lui propose de le mettre en contact avec un chef d’entreprise du même secteur d’activité qui pourra l’aider à éclaircir son projet, lui donner une idée de sa viabilité... Après envoi d’un curriculum vitæ, il est reçu par le Pdg de l’entreprise qui le met ensuite en contact avec un technicien PAO. Celui ci reste à disposition en cas de problème ponctuel.

Ces rencontres lui permettent de conforter son projet : critique sur le matériel, analyse de son niveau commercial, évaluation de son niveau technique en PAO..., "refaire le plein, dans le cas contraire, ça m’aurait pas arrêté mais j’aurais rencontré plus d’obstacles, perdu plus de temps". Cela confirme aussi l’existence d’un marché et l’intérêt d’une activité PAO sur la ville et le quartier. Le CAE le met en relation avec son club d’entreprises et dès le début lui confie la réalisation de son bulletin bitrimestriel. Mais ajoute-t-il : " je ne compte pas sur eux pour travailler, je cherche toujours à construire ma clientèle".

Conseillé dans ses démarches par le CAE, il prend le statut d’entreprise individuelle (EURL)et démarre en septembre 1995. L’Aide aux demandeurs d’emploi créant ou reprenant une entreprise (ACCRE), d’un montant forfaitaire de 32 000 F, lui est accordée en octobre mais versée deux mois plus tard. Bien que la plupart de ses investissements soient faits (matériel informatique), il manque de fonds propres pour débuter, payer les frais de constitution de société, de registre de commerce... Le CAE l’oriente vers l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE)qui lui fait un prêt relais. Il loue des locaux commerciaux pour lesquels il arrive même à négocier un paiement différé.

L’activité se développe et lui dégage actuellement un revenu moyen légèrement supérieur au SMIC. Il envisage d’embaucher quelqu’un pour les tâches administratives, ne serait-ce qu’à temps partiel pour le décharger de la partie commerciale et technique.

UN LIEN AVEC LES JEUNES DU QUARTIER

Bien que récente, son activité "marche bien" et le Pdg qui l’a rencontré a toute confiance dans ses capacités à la développer. On peut noter dans les "gages" de réussite la capacité personnelle de Samir K. à se former, mais aussi à entendre et suivre les conseils donnés par d’autres. La période d’activité informelle par laquelle il est passé a été pour lui une période de formation utile : le fait d’arriver à exécuter des contrats sans charges ni contraintes trop importantes lui a permis de conforter son assise technique et financière. Il avait déjà investi dans le matériel avant de créer son entreprise. Période courte mais indispensable pour assurer à terme une viabilité ?

Samir K. est bien dans ce qu’il fait, content d’avoir une activité qui le fait vivre et qui lui plaît. S’il continue de vivre et de travailler dans le quartier c’est qu’il a envie d’en montrer une autre image. "Si je ne pense pas de mal de l’endroit où je vis, je n’ai pas de raison de fuir, sinon, c’est l’exode ! Et puis il y a à faire. Commercialement, c’est aussi une raison. Ici, on parle toujours des problèmes, nous on n’en est pas fiers. Mais il se passe aussi plein de choses positives dont on ne parle jamais. Pour les jeunes que je côtoie, c’est important le "modèle". Ils ont besoin d’avoir des repères sur quoi se baser, des exemples, pas seulement comme ligne d’avenir celle que leur renvoient les media... Ils ont besoin de reconnaissance...".

Enfin, inscrit dans des réseaux amicaux de jeunes qui n’ont pas eu le même parcours que lui, il reste solidaire de ceux-ci et toujours en contact. Il souhaite que son exemple ouvre des perspectives plus réjouissantes que l’absence d’emploi pour la majorité. A défaut de "modèle" (tout le monde ne peut pas monter son entreprise)il espère participer à une dynamique plus positive.

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