Le défi de la communication populaire selon l’éducatrice Regina Festa
12 / 1994
L’animatrice en communication, éducatrice et professeur d’université Regina Festa est une personnalité connue qui s’occupe de la communication populaire au Brésil. Elle milite pour la cause de la communication populaire depuis très longtemps, depuis les tous premiers temps de l’ouverture politique du pays dans les années 1975/1976. Elle proposait déjà à ce moment-là que soit discutée la question de la communication et attirait l’attention sur son importance, alors que les préoccupations du reste de la gauche progressiste étaient encore surtout d’ordre économique. C’est à cette époque également que fut publié son livre "Comunicaçao Popular e Alternativa no Brasil" (Communication Populaire et Alternative au Brésil), l’une des anthologies les plus sérieuses sur le travail de résistance à la dictature pendant les années 60.
Au cours de la IVème Rencontre Latino-Américaine de Vidéo qui eut lieu à Cuzco, Pérou du 21 au 28/11/1992, Regina souleva certaines questions qui valent la peine que l’on s’y attarde. L’une d’elle est le concept de nation. Prenons l’exemple du nouveau cinéma latino-américain; il est né de la volonté d’une recherche d’une certaine unité nationale mais les années 80 qui ont apporté de grandes transformations technologiques, surtout dans le champ de la communication, ont profondément modifié toutes les relations. L’une des grandes transformations est la relation à l’image; cette dernière a subi un véritable processus de "distension", de globalisation grâce au satellite. Cette distention contient le risque culturel "de nous perdre", selon les propres paroles de Regina. Se défendre contre cette "perte de nous-mêmes" ne veut pas dire se replier derrière ses frontières, recourir à des rites traditionnels et folkloriques (dans le sens le plus conservateur)qui paralysent le mouvement de la culture. Ne pas se perdre à soi-même signifie comprendre que les nouvelles technologies de la communication causent une "reterritorialisation" qui redéfinit les groupes et leur identité culturelle. Selon un exemple qu’a cité Regina, quand les populations indigènes du Pérou recréent leur propre image, ce n’est pas uniquement leur image qu’ils ont en tête mais également celles des populations indigènes de la Bolivie, du Chili, etc. qu’ils ont déjà vues grâce aux médias.
Cette reterritorialisation soulève les questions suivantes: quelle est l’image que nous produisons de nous-mêmes? Quelle est l’image que nous avons intérêt à produire de nous-mêmes? Dans cette production, il faut considérer à la fois le point de vue national et régional. Jusqu’où peut aller notre diversité sans que soit dissoute notre identité?
Le nouvel ordre mondial exige que nous redéfinissions les rôles et les options lorsque nous nous occupons du travail de communication. La politique qui consiste à créer des grands blocs économiques dans une perspective de marché (par exemple le Mercosul qui va de Belo Horizonte dans l’état de Minas Gerais jusqu’à Corrientes en Argentine)remet en question la performance "micro" (locale et régionale)et "macro" (nationale et internationale). Cette politique ne prend pas en compte les aspects local, "micro", régional et désintègre les aspects culturel, social et politique. Elle réintègre tous ces mêmes aspects dans les structures, en imposant des logiques qui se superposent aux anciennes.
Selon Regina, il ne peut y avoir de globalisation sans Formation des masses. C’est pour cela qu’il est important de continuer à renforcer la pratique de la communication populaire à un niveau local, l’accès aux médias audio-visuels nationaux, les mouvements régionaux de vidéo, en essayant de définir une politique de la communication afin de pouvoir "tolérer de façon démocratique, franche et globalisante" les propositions des couches populaires et de la société civile. Vouloir cette pluralité ne signifie pas abandonner l’idée de la diversité. Cependant, à partir du concept de modernité, il faut fournir aux peuples les moyens d’accéder à la culture et à la connaissance. Ce faisant, il nous faut rechercher des manières de garantir le contrôle de la politique de communication, comme par exemple la Loi de la Démocratisation de la Communication en discussion au Congrès National.
Les questions qu’a soulevées Regina dans ce débat cherchent à appréhender la signification actuelle de la globalisation et du mouvement du marché économique dans leur relation politique, sociale et culturelle au destin des peuples.
cultural identity, innovation
, Latin America, Peru, Cuzco
Penser la communication populaire comme élément de démocratisation de l’information et du droit à la culture et à la connaissance doit faire partie des préoccupations de ceux qui pensent que la notion de modernité ne pourra se construire que sur la base de l’égalité des chances à partir de l’accès pour tous à l’information. Le débat principal que soulève Régina consiste à définir le rôle de ce que l’on appelle "vidéo populaire". Dans ce contexte, quelle est l’identité, la fonction, le poids de la dite "production alternative"? Dans quel but doit-on se constituer en mouvement? Quelle doit être son identité? Quelle est la fonction qu’il doit remplir? Dans un premier temps, la vidéo populaire a accompli le rôle de dénonciation, de construction de l’identité, de l’information. Avec l’avènement de l’ouverture démocratique, de la globalisation, des nouvelles technologies, quelle est l’image que nous voulons construire? Comment nous, en tant que communicateurs pouvons nous confronter la diversité sans dissoudre notre identité?
Cette conférence fut donnée pendant la IVème Rencontre Latino-américaine de Vidéo qui eut lieu à Cuzco, Pérou du 21 au 28/11/92. Fiche originale en portugais.
Colloquium, conference, seminar,… report
TRAMONTE, Cristiana; FESTA, Regina, IV ENCONTRO LATINO AMERICANO DE VIDEO (BRESIL)
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