La réponse de l’ORDIK : pragmatisme et modération
10 / 1994
En avril 1994, six stagiaires de deux associations intervillageoises maliennes, l’ORDIK (Organisation Rurale pour le Développement Intégré de la Kolimbine)et Djama Djigui ont participé à un stage video de dix jours animé par un formateur français. Après une période creuse de plusieurs mois due à des problèmes techniques sur le matériel et à l’hivernage, Barka Fofana, responsable de la communication à l’ORDIK a relancé l’activité. Il s’agit pour lui de se concentrer sur les actions innovantes dans la zone d’où le choix de montrer l’actuel regain d’intérêt dont jouit la riziculture, dans le Djomboukhou grâce à l’aménagement de mares. D’une durée de 20 à 30 minutes, le film de Barka devrait prouver que l’activité rizicole peut se pratiquer tant individuellement (cas d’un particulier)que collectivement (exemple de l’association des femmes de Dioumou)et que l’ORDIK est capable de réaliser les infrastructures nécessaires comme elle l’a fait avec la mare de Kouroukoula. Par ces images, Barka veut communiquer l’idée que cultiver soi-même le riz, dans certaines conditions bien précises, peut constituer un moyen de réduire la dépendance des villageois face aux migrants, pourvoyeurs des fonds permettant l’achat de cette céréale. Ce film sera ensuite projeté devant le comité de l’ORDIK, organe de décision de l’association, puis dans chacun des neuf villages membres. Récemment dotée en matériel audiovisuel par la FPH (Fondation pour le Progrès de l’Homme), l’ORDIK envisage le recours à la video dans deux directions : le film pédagogique, mettant en valeur une réalisation, une technique (un sujet est en cours sur les digues et diguettes de pierres pour la lutte anti-érosive)et la communication avec les migrants sur la vie du projet qu’ils soutiennent financièrement. Une grande salle de réunion pouvant également servir pour les projections et un petit magasin destiné à protéger le matériel de la poussière et à réaliser le montage dans de bonnes conditions viennent d’être construits. La video présente l’avantage de fournir une preuve visuelle, plus convaincante que les simples mots, de la réelle existence d’un barrage ou d’un puits. Elle offre la possibilité aux vieilles personnes et aux femmes, moins mobiles que les hommes, d’être tenues informées des activités du projet. Mais elle comporte également certains dangers. Ainsi, les responsables de l’ORDIK sont conscients qu’il ne s’agit pas de créer, dans les villages, de nouveaux besoins, en acceptant de filmer fêtes familiales, baptême, mariage...La mise en place d’une activité video à but économique est envisageable dans un avenir lointain, sous condition de respect de certaines règles de concurrence face aux entreprises privées répondant déjà à cette demande. Barka ajoute : "Si on se limite seulement à projeter dans les villages les films concernant nos activités ou celles d’autres associations, ou encore tout ce qui concerne la vie des émigrés, là je ne vois aucun inconvénient. Mais si on se met à diffuser des films qui peuvent être destructeurs ici, qui peuvent avoir un effet sur notre culture, sur l’éducation des jeunes, là il faut être prudent."
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, Mali
L’ORDIK expérimente actuellement le recours à la video dans ses activités de développement. Mais pour l’équipe technique de l’association, la nouveauté et la modernité de cet outil de communication ne doivent pas occulter les dangers et les limites qu’il comporte également. Pragmatisme et modération dominent donc, en particulier quant à l’amélioration de la communicaton entre le village et les foyers de migrants où la video pouvait apparaître comme la solution idéale. Barka déclare ainsi : "Même s’il y a l’image, si les gens ne veulent pas comprendre, ils ne vont pas comprendre. Sans la bonne volonté, ce n’est pas que les images et le son qui pourront faire changer les choses."
Entretien avec FOFANA, Barka
Interview
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