02 / 1993
Construit en 1990 sur demande de la population, le barrage de Kabaté est la première grande action d’aménagement faite sur la Kolimbine. L’objectif de l’ouvrage est de maîtriser et valoriser une partie des mètres cube d’eau du débit de la Kolimbine. L’eau ainsi retenue aura le temps de s’infiltrer plus et donc de recharger la nappe souterraine et allonger la période d’utilisation des puits. Un hivernage après sa construction les impacts du barrage sont déjà perceptibles. Le barrage a permis de réduire les besoins en eau domestique (lessive, confection de briques, construction), d’allonger la période d’abreuvage d’animaux et du maraîchage. Tiema, chargé des travaux à l’Ordik : "Autrefois il y avaient des villages qui ne vivaient ici que de la pêche. Et puis il y a eu la saison sèche et le poisson est devenu une denrée rare. Cette année on a eu au moins trois cent soixante personnes qui ont fait la pêche sur la Kolimbine. Il y a eu 4 tonnes de poissons pêchés. On a même vu réapparaître des espèces de poissons qu’on ne voyait plus. En ce qui concerne l’eau, les puits n’ont pas tari durant toute la saison sèche. Avant les gens préféraient boire l’eau du marigot qui avait meilleur goût car moins salée. "Les nappes se sont rechargées ce qui a amélioré le goût de l’eau. En plus les femmes ont pu faire durant la saison sèche leur maraîchage". Avant la construction de ce barrage, les villageois étaient obligés de faire un rempart de sacs de sable pour essayer de retenir l’eau. Avec cette technique, ils arrivaient à stocker l’eau 3 à 4 mois. C’est à dire qu’ils avaient un peu d’eau jusqu’en Décembre. Ensuite, il fallait creuser en permanence des puisards dans le marigot durant toute la saison sèche pour l’abreuvage des animaux et satisfaire aux besoins domestiques. L’idée du barrage est donc née de ce besoin d’eau. Seuls les villageois qui avaient eu l’occasion de sortir avaient eu l’occasion de voir ce qu’était un barrage. La plupart des villageois cependant avaient déjà entendu parlé du barrage de Kita. Pour construire le barrage de Kabaté, il a fallu d’abord gagner la bataille de l’information. Il a fallu en effet convaincre d’abord les villageois qu’il était possible de construire un ouvrage similaire sur la Kolimbiné. Le fait que le premier barrage construit par l’ORDIK sur la Kolimbine se soit effondré les ayant rendu sceptiques. La possibilité technique de construire le barrage a d’abord été examinée au niveau du comité ORDIK. Ce comité comprend 32 personnes ; soit 4 représentants par village. Il se réunit tous les premiers lundis du mois . Lors de ces réunions chaque responsable du projet fait un compte rendu exhaustif au comité de son activité. C’est lors d’une de ces réunions que le responsable des barrages au sein de l’Ordik a exposé et défendu la nécessité et la possibilité de construire un barrage sur la Kolimbine. La décision au niveau du comité n’a été arrêtée qu’après de longues discussions, par consensus. Après la réunion les membres du comité sont rentrés aussitôt informer leurs villages. Il a fallu donc organiser des réunions d’explications dans les huit villages avant le démarrage des travaux. Les membres du comité et l’équipe technique ORDIK ont dû s’investir en parole et en crédibilité pour convaincre d’abord les notables des villages, ensuite les différents groupes d’âge et de sexe : les hommes, les femmes, les jeunes. Le travail de conviction pour les travaux pouvaient débuter. Tout le monde a participé à la construction de ce barrage. Trois à quatre mille personnes ont mis la main à la pâte. Même les femmes y ont contribué en préparant à manger pour tout le monde. Les jours des travaux étaient annoncés à travers les circuits traditionnels de circulation de l’information. C’est à dire à la mosquée, après la prière du soir pour les hommes ; aux puits pour les femmes et autour du partage du thé pour les jeunes. Et chaque matin du jour des travaux, un crieur traditionnel passait avec son tambour devant toutes les concessions pour rappeler l’heure du début des travaux.
popular culture, cultural change, democracy, development history, cultural identity, popular participation, innovation, traditional knowledge, seed, tradition and modernity, traditional knowledge enhancement
, Mali
La construction de ce barrage a renforcé et réactualisé les circuits d’information traditionnels mais aussi la solidarité entre les 8 villages. Il y a des villageois qui faisaient jusqu’à 20 Km à pied pour aller participer aux travaux. Ce barrage a étendu le travail de solidarité qui se fait souvent à l’échelle d’un village, (pour les récoltes par exemples)au niveau des 8 villages.
Interview
GAKUNZI, David