Problèmes et perspectives
02 / 1994
Face à l’effondrement des cours de la viande consécutive à l’entrée de la Grande Bretagne dans la CEE, quelques producteurs de mouton du Larzac créent en 1984, le GIE des Grands Causses, pour transformer et assurer la vente directe de leur production. Limitée d’abord au réseau des sympathisants du mouvement du Larzac, dont les producteurs sont proches, la commercialisation s’est progressivement organisée autour de deux pôles: les livraisons sur commande dans un réseau de villes éloignées, avec un camion frigorifique, et la vente sur des marchés de proximité, avec un camion magasin. Au fil des années, de nouveaux producteurs adhèrent à la démarche et la gamme de produits commercialisés se diversifie (mouton, veau, porc, fromages, miel). En 1993, ce sont 12 producteurs qui commercialisent tout ou partie de leur production à travers le GIE, qui s’est doté d’une salle de découpe, d’un atelier de conserverie, d’un camion-magasin plus performant et d’un matériel publicitaire élaboré.
Cette structure fonctionne depuis 10 ans, sans rupture notable: elle a su intégrer de nouveaux arrivants, en refuser d’autres, s’adapter au marché. Sa solidité repose sur des résultats économiques satisfaisants et sur une organisation rigoureuse qui a permis à la fois de préserver "l’esprit" et les relations affectives qui ont initialement fondé la démarche, et de construire un outil économique performant. Ainsi, le volume de travail du GIE est réparti entre l’ensemble des membres, au prorata des chiffres d’affaire respectifs réalisés avec la structure. Une heure de travail ayant été évaluée à 250F de chiffre d’affaire, le temps de travail réalisé en sus du quota dû est rétribué, et inversément, les heures non réalisées sont remboursées au GIE, par le producteur déficient. Chaque membre est responsable d’un marché précis. Le fonctionnement du GIE a été codifié par un règlement intérieur, et tout nouveau candidat est soumis à une période d’essai de 6 mois. Une organisation rigoureuse était indispensable, aux dires des membres du GIE, pour éviter les décallages dans le degré d’engagement, à mesure que la structure grandit.
La pérennisation de l’organisation se heurte maintenant à un nouveau type de problème. Le chiffre d’affaire (1,7millionsF en 1992), bien que satisfaisant, est stagnant depuis plusieurs années: le marché des réseaux lointains ne progresse plus, voire régresse. Par contre, les marchés de proximité peuvent encore être développés. Mais tout développement suppose une augmentation de volume de travail difficile à assumer par les membres du GIE. Le recours à un salarié implique d’augmenter de manière conséquente le chiffre d’affaire, et, dans le cas de l’emploi d’un agent commercial, risque de porter atteinte à l’image du GIE: en effet, une large part de son succès est liée au contact direct crée entre producteur et consommateur.
Par ailleurs, le développement des activités au delà du seuil actuel, supposerait de nouveaux et importants investissements, notamment pour assurer la mise aux normes CEE de la plupart des ateliers de production.
Après 10 ans d’un fonctionnement original, mêlant l’économique et l’affectif, le GIE semble maintenant confronté à une alternative difficile: se développer en intégrant davantage la logique économique, ou choisir la stabilité au risque de régresser. Dans les deus cas, le risque est grand de voir l’équilibre et l’originalité de l’expérience malmenés.
agriculture, countrymen’s organization
, France, Aveyron
Cette expérience correspond à une forme d’agriculture que l’on présente volontiers comme une réponse à la crise du "modèle productiviste" de la modernisation agricole: une agriculture dégagée des contraintes de filières agro-alimentaires pesantes, autonome et facteur de développement local. Qu’en est-il en réalité? Les choses sont évidemment plus complexes. Cette forme de vente collective permet éffectivement de dégager une plus-value intéressante par rapport à une production valorisée dans des filières "classiques". Mais, d’une part, elle ne concerne qu’un nombre limité d’exploitations, et toute multiplication non concertée de ce type d’expérience engendre rapidement des phénomènes de concurrence. D’autre part, l’autonomie par rapport aux organisations économiques "classiques", n’est pas totale. Les exploitations productrices de viande notamment ne peuvent valoriser toute leur production à travers le GIE, et vendent leurs excédents (en général, la moins bonne qualité)dans les filières "classiques"...
Interview
ENSAM (Ecole Nationale Supérieure d’Agronomie de Montpellier) - L’ENSAM fait partie depuis janvier 2007 de Montpellier SupAgro qui est née de la fusion de 4 établissements : ENSAM, Centre national d’études agronomiques des régions chaudes (CNEARC), Département industries agroalimentaires régions chaudes de l’École nationale supérieure des industries agricoles et alimentaires (ENSIA-SIARC) et Centre d’expérimentations pédagogiques de Florac (CEP Florac). 2 place Pierre Viala, 34060 Montpellier Cedex 1, FRANCE - Tél. 33 (0)4 99 61 22 00 - Fax 33 (0)4 99 61 29 00 - France - www.agro-montpellier.fr - contact (@) supagro.inra.fr