04 / 1993
Au moment des réformes économiques et de la décollectivisation dans les campagnes chinoises, s’est posée entre autres la question de la répartition du matériel agricole et du cheptel entre les agriculteurs.
1. A la fin des années 1970, la grande majorité des moyens de production agricoles étaient collectifs. A Bozhou,c’était le cas des motoculteurs et des tracteurs, utilisés principalement pour le transport, des camions ainsi que des motopompes installées pour une irrigation d’appoint à partir des puits ou des canaux. De même, tout le matériel de traction attelée et les animaux de trait appartenaient à l’équipe de production c’est-à-dire à la collectivité locale correspondant au hameau, soit environ 200 personnes.
D’autres matériels de plus grande dimension et d’usage plus élargi appartenaient à des collectivités d’ordre supérieur telles que la brigade (2000 personnes)ou la commune (10 à 15.000 personnes)voire le district. C’étaient les moulins, les pompes de grande puissance, etc...
En même temps, était apparue au sein du système collectif une capacité d’accumulation pour les familles et certaines possédaient des moyens de production de petite ou moyenne dimension dont les plus imoportants étaient le tombereau à bras et la bicyclette, issus de l’industrie naisssante.
2. Lors de la décollectivisation, tous les moyens de production privés sont restés à leurs propriétaires. De même, les petits outils agricoles (houes, faucilles, bêches, rateaux, pelles, fourches...), à peu près en nombre égal aux travailleurs, sont laissés à chacun. Par contre, le mode de distribution des autres moyens de production est organisé par la collectivité qui en est propriétaire. A Mazhuang, les animaux de trait et les outils de traction attelée ont dans un premier temps été attribués à des groupes de 5 à 8 familles. En effet, la première étape de la décollectivisation a été la mise en place de contrats de production de grains entre l’Etat et des groupes de familles. Il semble qu’alors, chacun de ces groupes ait reçu un attelage complet. Deux ans plus tard, en 1982, ont été mis en place des contrats de production de grains entre l’Etat et les familles directement. Alors, chaque famille a reçu qui une charrue, qui un boeuf, qui un semoir, etc... Une péréquation est faite et celles qui ont reçu pour une moindre valeur en matériel paient l’équivalent de la différence aux autres. En 1982, à Mazhuang, les attelages ne sont pas en nombre suffisant pour que chaque famille en reçoive un complet. Aussi, les parents ou amis se groupent souvent entre eux pour les gros travaux. Cependant, rapidement, de nombreuses familles ont pu acquérir du nouveau matériel.
3. Les outils motorisés- motoculteurs, pompes, moulins,...- ont, eux, été vendus aux enchères par les collectivités. Les acheteurs sont les familles qui ont réussi à accumuler à peine plus que les voisins: ce sont souvent les familles avec une main-d’oeuvre nombreuse ou ayant eu des responsabilités au sein de l’administration communale. Mais beaucoup de moyens de production ont été vendus hors du canton, comme le tracteur et la pompe de Humiao. Les agriculteurs locaux n’ont pas eu les moyens de les acquérir ou ont eu d’autres priorités. Si bien qu’en 1990, aucune irrigation d’appoint n’est plus effectuée à Humaiao à partir des canaux ni des puits, conséquence de cette fuite de capitaux productifs vers d’autres régions plus riches.
Les tracteurs et motoculteurs ont par contre souvent trouvé acquéreurs sur place. La plupart ont été achetés par les paysans chargés de leur entretien pendant la collectivisation. Leur savoir-faire a facilité l’obtention de prêts auprès de la banque agricole. En quelques années, ces emprunts ont pu être remboursés grâce à la rentabilité très rapide des activités de transport juste après les réformes. En effet, les véhicules motorisés étaient encore rares à l’époque et la demande forte.
agriculture, land reform, agricultural policy, agricultural equipment, social differentiation, rural development, local community
, Asia, China, Anhui
Tous les moyens de production n’ont pas été privatisés en Chine lors des réformes du début des années 1980. Notamment les infrastructures hydrauliques de moyenne et grande dimension, essentielles pour le développement agricole chinois, restent gérées par les collectivités.
Le côté "égalitariste" de la distribution du petit et moyen outillage contraste avec l’aspect arbitraire voire disqualifiant de la vente aux enchères du matériel plus important. Le résultat en a été d’accentuer la répartition interrégionale inégale des moyens de production agricoles, disparités qui existaient déjà pendant et juste après la collectivisation.
Ma thèse (Institut National Agronomique Paris-Grignon; en cours)résulte d’un travail de recherche de terrain, d’observations et d’enquêtes menées auprès des acteurs de l’agriculture locaux: paysans, cadres,...dans plusieurs districts chinois.
Theses and dissertations
DIDERON, Sylvie, INSTITUT NATIONAL AGRONOMIQUE PARIS-GRIGNON, 1993/00/00 (Suisse)