Pour lutter contre les dépôts sauvages et créer du compost utilisable
09 / 2007
A l’origine du projet
De manière spontanée, certains habitants avaient accumulé leurs déchets verts dans un espace inoccupé du quartier. Par accord tacite, la commune tolérait ces dépôts et les enlevait régulièrement. Quand ces dépôts sauvages ont été interdits, les habitants ont cherché à organiser des dépôts structurés de déchets verts et ont sollicité le soutien de la commune pour la mise en place des compostières et le broyage annuel des déchets.
Objectifs et enjeux
1 Structurer les dépôts spontanés de déchets verts et permettre une gestion efficace
2 Permettre l’évacuation de leurs déchets et éviter le transport à la déchetterie (par les habitants)
3 Eviter la récolte ainsi que le traitement des déchets verts (par la commune)
Qu’est-ce qu’une compostière de jardin ?
En compostant ses déchets de jardin et ses déchets organiques de cuisine comme des épluchures de fruits et de légumes, des sachets de thé ou votre marc de café (et bien d’autres substances encore) dans son jardin et même à l’intérieur, il est possible de réduire de plus d’un tiers le poids de la poubelle ménagère. Pas besoin d’un grand jardin, ni de déchets en quantité, tout le monde peut réaliser un compost, même sur une terrasse ! L’association Comité Jean Pain donne ici quelques conseils pratiques :
« Dans certaines conditions favorables, les matières organiques mises en tas sont peu à peu désagrégées puis remaniées grâce à l’intervention de micro-organismes (bactéries, champignons,…) et d’organismes vivants comme les vers de terre, les insectes,… Ces réactions nécessitent de l’oxygène et dégagent de la chaleur. La température s’élève au fur et à mesure de la décomposition. Elle peut atteindre 50 à 70°C. Puis elle diminue. Cette température élevée élimine en partie les semences de mauvaises herbes, les virus, les bactéries ainsi que les nématodes (sorte de stérilisation). Le compost est mur après : 3 à 6 mois, au printemps et en été ; 6 à 9 mois, en automne et en hiver. (…) »
Les auteurs donnent encore des informations pratiques sur le volume minimum nécessaire, le type de déchets (équilibre carbone/azote), la teneur en humidité (40 à 60 %) ainsi que les compléments à fournir pour aider le compost à se réaliser. Enfin, quelques informations utiles sur le brassage, le stockage et l’utilisation du compost.
Déroulement du projet à Louvain-la-Neuve
Les habitants peuvent déposer leurs déchets verts dans une compostière de quartier. Ils bénéficient d’un soutien de la ville pour l’installation de celle-ci et le broyage des déchets.
La gestion est entièrement à charge des habitants. Une personne est responsable de produire le règlement (définition des déchets admis dans les compostières) et d’organiser les journées de broyage (1 à 2 par an).
La compostière se divise en deux espaces : les compostières et les tas de déchets qui attendent d’être broyés (différents tas selon la nature et la taille des branchages, les tontes de pelouse, …). Une à deux fois par an, une opération de broyage est organisée : la matière obtenue est utilisée pour les compostières (cf. le besoin d’alterner déchets verts/humides et déchets bruns/ligneux).
Les déchets compostés et/ou broyés sont à disposition des habitants (en moyenne, 3 à 4 brouettes par famille chaque année)
Données pratiques
Echelle territoriale: Quartiers de la commune
Public cible : Les habitants du quartier
Acteurs du projet : les habitants des quartiers ; l’éco-conseillère de la commune ; le service travaux de la commune ; un expert en compostage (Comité Jean Pain, Espace – Environnement, …) ; l’UCL (université catholique de Louvain-la-Neuve) qui est propriétaire des espaces où sont installées les compostières
Durée actuelle : 5 - 6 ans
Résultats actuels : Deux compostières existent et fonctionnent. Deux autres sont en projet.
Sources de financement : La commune fournit un subside ponctuel pour les frais de broyage. Pour la construction de la compostière, elle achète le matériel. Elle met également à disposition le personnel du service travaux pour des travaux importants. Sans cela, le quartier ne serait pas capable de mettre en Ĺ“uvre les compostières. Le quartier finance les photocopies des tracts informatifs, les boissons consommées lors des journées de broyage (1 à 2 fois par an).
10 Principes de Bonne Gouvernance
10 Questions ont ensuite été posées lors de cet entretien pour mieux comprendre comment cette expérience peut s’approcher des principes de Bonne Gouvernance énoncés par l’Alliance pour un monde responsable, pluriel et solidaire en juin 2001 in «Les principes de la gouvernance au XXIe siècle» et ce afin d’échanger ces pratiques avec celles du Congo en matière d’habitat et de gestion des déchets.
1- Se fonder sur une approche territoriale et le principe de subsidiarité
Ce projet est né en réponse à un problème particulier (évacuation des déchets verts), ancré dans le territoire local (un quartier de la commune d’Ottignies – Louvain-la-Neuve) et initié par l’échelon de pouvoir le plus proche de ce territoire (les habitants et la commune) : il était d’abord en gestation au sein des habitants qui ont cherché à obtenir un soutien explique l’Echevine.
La gestion est assumée par les habitants eux-mêmes, en respect du principe de subsidiarité. Ils ont donc, selon les quartiers et les caractéristiques de ceux-ci (nombre d’habitants), leur propre mode de fonctionnement.
2- Instituer un dialogue au sein de communautés plurielles
Non pertinent pour le projet
3- Gérer les ressources naturelles et remettre l’économie à sa juste place
Le projet s’inscrit dans une démarche de développement durable :
sur le plan environnemental, on évite surtout les déplacements en voiture jusqu’au parc à conteneurs, ce qui réduit les émissions de CO2 ; les compostières permettent aussi un recyclage de matière ;
sur le plan économique, cette démarche peu coûteuse évite de nombreux frais (déplacements, traitement,…) ;
sur le plan social, la compostière nourrit la dynamique de quartier (fréquentation du lieu, journées de broyage et de travail collectif,…).
4- e fonder sur une éthique universelle de responsabilité
Ces compostières permettent de responsabiliser les habitants et le quartier par rapport à la gestion des déchets : « En faisant ça, en en discutant les uns avec les autres, ça assure un apprentissage sur la saine gestion des déchets (…). Ça alimente la réflexion sur les déchets ménagers » signale l’Echevine.
Pour la gestion des comptes, l’habitant initiateur du projet est responsable de rentrer les notes de frais à la commune pour obtenir remboursement.
5- Définir un cycle d’élaboration de décision et contrôler les politiques publiques
L’essentiel du projet repose sur les épaules des habitants, soutenus par la commune : ils sont initiateurs, gestionnaires, définissent eux-mêmes les règles de fonctionnement des compostières (celui-ci variant d’un quartier à l’autre, en fonction de ses caractéristiques).
L’évaluation n’est pas très formalisée : l’éco-conseillère assure le collège communal de la réussite qualitative du projet, mais il est difficile de l’évaluer d’une manière quantitative (seulement évaluation visuelle). C’est surtout lors de nouveaux projets de compostières qu’on évoque le succès des actuelles.
L’éco-conseillère reste en contact régulier avec les habitants responsables.
6- Organiser la coopération et les synergies entre acteurs
Les acteurs tâchent de négocier ensemble (commune / habitants), et dans la mesure où tous croient en la réussite du projet, un espace de discussion et de compromis est possible.
Au sein de ces discussions, il est important de savoir justifier sa position, argumenter les idées qu’on propose pour aboutir à un partenariat équilibré.
7- Concevoir des dispositifs cohérents avec les objectifs poursuivis
Les procédures ne sont pas perçues comme des freins à la mise en place et au fonctionnement des compostières par l’éco-conseillère. « Pour moi ça n’est pas difficile de passer par le collège communal, pour les habitants ça l’est peut-être quelque fois… (…) J’estime qu’en tant qu’agent communal que c’est notre devoir de répondre à l’attente des habitants mais en tenant compte de l’ensemble des desiderata de l’ensemble des acteurs et des procédures administratives nécessaires et obligatoires. (…) La commune doit être garante que ça se passe dans la légalité et dans une optique développement durable », nous dit l’Echevine.
Pour les habitants, il est très important d’avoir une seule personne de référence au sein de la commune pour gérer leur projet et que celle-ci soit de très bonne volonté, avec une gestion transparente.
8- Maîtriser les flux d’échange des sociétés entre elles et avec la biosphère
L’évaluation quantitative précise des déchets compostés est difficile.
L’évaluation qualitative est assurée par les habitants de bonne volonté quand ils passent déposer leurs déchets et qui vérifient que des objets inappropriés (canettes, pain, …) n’ont pas été jetés dans le compost.
Sur le plan humain, une plus grande implication pourrait parfois être souhaitée mais il est difficile de la susciter, d’autant que les personnes qui portent le projet semblent satisfaites de l’état de la situation.
9- Gérer la durée et savoir se projeter dans le temps
L’organisation temporelle connaît différents rythmes : « Il faut toujours s’adapter au cadre administratif de l’autre, à son temps de réaction », dit l’Echevine.
Pour l’éco-conseillère, « il est important de prendre suffisamment de temps pour la réflexion lorsqu’un projet démarre. C’est sans doute parce que vous avez la vision la plus large, du côté du pouvoir qui va subsidier, de tout ce que ça implique. (…) C’est peut-être une lenteur mais c’est un gage d’une compréhension générale du problème. » (cf. les demandes d’autorisation, …)
Le projet vise à être durable et à se maintenir dans le temps mais pour se faire, il dépend fortement de la présence d’habitants motivés qui s’impliquent et prennent en charge la gestion. C’est là le point crucial, celui qui est le plus difficile à garantir. Le maintien du soutien du pouvoir exécutif à l’égard du projet est important aussi pour sa pérennité. Toutefois, dans la mesure où ce projet est né des besoins et de la volonté des habitants, sans être suggéré par le pouvoir communal, il est fort probable qu’il continue d’exister sans l’appui de celui-ci, mais alors sous une forme plus réduite et moins structurée.
10- De la Légalité à la légitimité de l’utilité, des valeurs, des méthodes
Le projet apparaît légitime aux habitants, dans la mesure où il émane d’eux et répond à une réelle demande d’évacuation des déchets dit l’Echevine : « les gens se retrouvent comme copropriétaires du projet et acceptent de déléguer du pouvoir au coordinateur ».
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, Belgium, Wallonie
Bonne Gouvernance en matière d’habitat et de gestion des déchets
Evaluation :
Le projet répond à une réelle demande d’évacuation des déchets et fonctionne relativement bien. Il s’est amélioré depuis sa création (cf. réajustement au sujet des matières autorisées ou non dans les compostières) et continuera sans doute de s’améliorer. Pour se faire, il pourrait être intéressant d’inclure les enfants du quartier dans la démarche, de les sensibiliser et de les informer au sujet du compostage et de la gestion des déchets.
Le fait que le quartier soit structuré est une aide précieuse à la réussite du projet (cf. fête de quartier existante depuis 30 ans).
Questions que pose cette expérience :
1 Pourquoi est-ce qu’une idée comme celle-ci, peu coûteuse et pas compliquée, est difficile à transposer dans d’autres quartiers ?
2 Comment mettre en balance une petite complication de la vie quotidienne avec le sens que cela a pour un avenir planétaire de développement durable ?
3 Comment lutter contre l’individualisme ambiant ?
4 Comment lutter contre certaines habitudes culturelles (résistance au compost en raison des odeurs, des nuisances, …) ?
Cette fiche a été élaborée dans le cadre d’un échange d’expériences sur les pratiques de Bonne Gouvernance en matière d’HABITAT et de GESTION DES DECHETS entre le Congo et la Belgique en 2007 et 2008.
Interview
Entretien et acteurs de cette fiche :
Cécile Lecharlier, échevine de l’Environnement de la Commune, Tél : +32 10 43 78 62
Dorothée Hébrant, éco-conseillère, Tél : + 32 10 42 05 66
Comité de compost : Monsieur Possoz ou MadameHottiaux
Information sur les compostières :
Habitat et Participation - Place des peintres 1/004, 1348 Louvain-La-Neuve, BELGIQUE - Tél. (32) 10 45 06 04 - Fax (32) 10 45 65 64 - Belgium - www.habitat-participation.be - hep (@) tvcablenet.be