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Le gouvernement malgache est sous la coupe de la Banque Mondiale

Les organisations de base de Madagascar en lutte contre le néo-libéralisme et le Plan d’Action de Développement rural

Mateo REGAZZONI

08 / 2004

La Coalition Paysanne de Madagascar (CPM) est une plate-forme d’organisations paysannes (regroupant 3000 associations de base) créée en novembre 2001. Elle est née en réponse à un Plan d’action de développement rural (PADR) présenté par le gouvernement et la Banque Mondiale (BM) en 2000.

Ce Plan clairement néo-libéral sert les intérêts des grands propriétaires et… du président. Ce dernier est le détenteur de la majorité du marché alimentaire malgache. « Il est le chef de l’agro-industrie. Et le secrétaire général du Ministère de l’agriculture est… le directeur de l’entreprise agricole du président ! » Le PADR vise à une réorganisation foncière de Madagascar à travers de nouvelles lois. « Le néo-libéralisme commence à se faire sentir. L’introduction des OGM dans l’agriculture malgache a été faite de manière cachée. A partir de 2000, les particuliers et consortiums étrangers, grâce a une nouvelle loi, ont le droit d’acheter la terre à Mada. Quand on sait que seulement 25% des terres sont titularisées, cela présage d’une catastrophe. »

Cette politique obéit à la règle selon laquelle l’agriculture doit être orientée vers le marché. « Son but est d’industrialiser l’agriculture. La campagne doit se tourner vers la monoculture d’exportation. A terme, les paysans travaillant dans les exploitations familiales deviendront des ouvriers de l’industrie agricole. »

Madagascar fait partie du Common Market of Eastern and Southern Africa (COMESA) et il est projeté que le pays soit son fournisseur en riz. Madagascar produit environ 3 millions de tonnes de riz par an et sa population en consomme 3 millions deux cent mille. « Pour pouvoir devenir exportateur, le gouvernement se propose de changer les habitudes alimentaires des Malgaches, pour qu’ils ne consomment plus de riz ! Un autre exemple : nous produisons un excellent poulet de race locale qui plaît beaucoup aux Etats-Unis. Eh bien, on nous impose de manger du «poulet de chair», élevé en 45 jours et qui n’a aucun goût, pour pouvoir exporter notre poulet malgache ! »

Face à ce désastre, les diverses fédérations et confédérations paysannes se sont donc réunies pour réfléchir ensemble. « Dans le contexte de l’époque, les paysans étaient dispersés. Ils n’étaient pas consultés au niveau des politiques agricoles de Madagascar. Il a été décidé qu’il était indispensable que les paysans soient impliqués dans tous les processus du développement rural et de tous les processus de décisions. » En 2001, les 20 régions du pays se réunissent. La CPM est ouverte à toute organisation paysanne. Seuls son caractère revendicatif et sa position claire pour une réforme agraire sélectionnent les associations participantes.

« Actuellement, le gouvernement fait tout pour que les organisations paysannes ne participent pas aux discussions sur le Plan et les organisations paysannes font tout pour y participer le plus possible. » L’équipe permanente de pilotage (EPP) est chargée de tracer les lignes principales du Plan. Le gouvernement prend ensuite les décisions en fonctions de ses propositions. Cette équipe est formée de 18 personnes, dont 15 secrétaires généraux des différents ministères concernés, les directeurs généraux des projets qui font partie du Plan, et 3 représentants des mouvements sociaux, dont Toto Julien Malazarivo.

La Coalition paysanne a en effet choisi d’être partie prenante de l’EPP pour pouvoir faire pression de l’intérieur, faire des propositions et, surtout, savoir ce qui se passe, car les premières esquisses du Plan ont été tenues secrètes. « De plus, nous ne craignons pas de perdre notre légitimité auprès des paysans de la base, car nous avons un système de transmission de l’information efficace. »

« Une des activités de la CPM, qui est aussi un de nos objectifs pour changer les structures foncières de Madagascar, c’est la formation des paysans. » Des ateliers sont organisés dans toutes les régions du pays et, depuis 3 ans, 600 paysans sont formés chaque année. Les thèmes traités sont, par exemple, la formulation de projets, la gestion d’une organisation, ou la technique de négociation…

Un autre objectif est la collecte d’informations sur les mesures prises par le gouvernement, pour ensuite faire descendre cette information vers les paysans et susciter le débat. « La plupart des petits paysans ne possèdent pas de titre de propriété ; dans la campagne, il existe le droit coutumier (les terres se passent de père en fils), ce qui ne correspond pas au droit de l’Etat qui stipule, depuis 1960, que les terres sans titre lui appartiennent. Les paysans ne le savent pas et sont exposés au risque d’être expulsés en cas «d’achat» de leur terre. » Les expulsions ont débuté en septembre dernier.

Key words

land reform, food sovereignty, agricultural policy, land ownership policy, struggle for land, economic globalization


, Madagascar

file

Foro Mundial sobre la Reforma Agraria (FMRA)

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Aujourd’hui, les paysans malgaches ont toutefois obtenu quelques succès. Un de ceux-ci est le niveau de représentation des paysans dans la plupart des entités administratives régionales. Par exemple, dans les Chambres d’agriculture, 100 % des paysans membres sont issus d’associations qui font partie de la CPM.

La Coalition s’est également rapprochée de Via Campesina, dont elle partage la philosophie. « Nous voulons que les paysans prennent leurs responsabilités ; nous ne voulons pas que les paysans s’intègrent dans des projets qui ne sont pas les leurs. Nous voulons la souveraineté alimentaire ; nous voulons produire ce que nous voulons et de la manière que nous voulons. Nous refusons les OGM et les modèles agricoles imposés par l’extérieur. Nous refusons les plans de la Southern African Development Community (SADC) et de la Banque Mondiale. »

Notes

Cet entretien a été réalisé par ALMEDIO Consulting avec le soutien de la Fondation Charles-Léopold Mayer pendant le Forum mondial de la Reforme agraire (Valencia, Espagne, 5-8 Decembre 2004).

Source

Interview

MALAZARIVO, Toto Julien. Secrétaire exécutif.

Coalition Paysanne de Madagascar (CPM) : 61, rue Dr Rajaonah Ankadifotsy . BP 7061 . 101 Antananarivo . Madagascar. Tél : 261 20 22 325 61. E-mail: cpm@wanadoo.mg

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